Souvent, je me promène sur les marchés aux puces de Strasbourg, et depuis de très nombreuses années, depuis l’enfance, en fait. Mon grand-père était antiquaire à Saint-Ouen, et j’ai gardé le goût des vieilles choses.
Faute de pouvoir acheter nombre d’objets, j’ai pallié à cette envie, en prenant des photographies des objets qui me plaisent. Jusqu’à présent, je n’ai jamais eu le moindre problème avec aucun marchand, d’ailleurs, pourquoi en aurais-je eu, je ne fais rien de mal, je prends simplement une photo d’un meuble qui ne va pas porter plainte pour droit à l’image, en tous les cas, aucun meuble ou objet n’a jamais porté plainte contre moi.
Aujourd’hui, j’ai vu, Place Broglie sur un stand, une chaise qui me plaisait bien, année 30 dans le style fin XIXe, déjà restauré, pas mal et puis, un saxo cuivré, rutilant, magnifique, photo ci-jointe, j’ai un faible pour les instruments de musique, et je l’ai pris en photo, rien de mal, enfin, je croyais.
Curieux, je me suis attardé sur le stand, pour regarder une montre à gousset Omega puis un jeune blond, genre surfeur s’est approché de moi avec un léger accent anglais ou américain, et m’a demandé de ne pas faire de photos. Je n’en faisais déjà plus, j’en avais pris deux, le saxo et la chaise.
- Pourquoi ? Lui demandais-je sans la moindre animosité, juste pour information.
- Parce que !
Il n’allait pas me répondre qu’il ne voulait pas que l’on sache qu’il possédait une marchandise illicite, qui avait été emprunté à un ou plusieurs particuliers alors qu’ils étaient en congé dans les landes.
- Je n’ai pris que deux images, je n’en fais plus, mais c’est quoi le problème ? Demandais-je à nouveau.
Et là, une furie originaire des Iles des Dom Tom est arrivée comme une folle en rangeant deux guitares dans des étuis bleus et noirs dans sa camionnette, et en m’insultant avec une grossièreté jamais encore entendue sur les marchés depuis que je les visite, peut-être devait-elle se croire dans un bouge des bas-fonds qu’elle avait fréquenté dans sa jeunesse, il y a longtemps :
- Connard, enculé, va te faire foutre, saloperie… T’as pas le droit de faire des photos… Salopard de ta race…
Mon épouse, outrée par ce langage, on le serait à moins :
- Mais enfin, on ne peut même pas regarder sans se faire insulter ?
- Ta gueule, toi et tes photos de merdre, va te faire foutre, saloperie…
- Laisse tomber, disais-je à mon épouse, ne réponds surtout pas, ça l’encourage.
On a été assaisonné, mais alors, à l’huile bouillante, au vinaigre d’acide sulfurique, aux postillons H1N1, aux puces de la peste, enfin, on a tout pris, la bonne femme nous a litéralement lessivé, blanchi à l'eau de Javel, on était plus toxique, on était exterminé.
Ah! Quand la haine s'en mêle...
J’étais tout de même surpris par cette réaction disproportionnée à notre égard, n’ayant, à mon avis, strictement rien fait de mal pour mériter une telle diatribe de la part d’une hystérique aussi imposante qu’elle était laide et malveillante, et qui devait avoir des vapeurs qui lui faisaient péter la cafetière.
En effet, la cinquantaine passée, avec ses airs de Madame Thénardier, des culs de bouteilles sur les yeux, le jupon marron lui ceignant les hanches plus qu’imposantes, elle avait omis de disposer un panneau sur son stand :
INTERDIT DE PHOTOGRAPHIER AUX CONNARDS ET AUX ENCULÉS !!!
Signé, La Direction.
- Vous avez volé des objets pour avoir cette réaction ? Demandais-je avec humour.
- Va te faire foutre, enculé, connard, voler des objets, salopard, sale race…
J'ai bien retenu le "sale race", ça me changeait un peu des insultes communes.
"Sale race", jusqu’à présent je ne connaissais qu’une seule race, celle des humains et sale, je ne crois pas, je suis très soigné de ma personne, avec un sens de l’hygiène particulièrement prononcé, nous ne devions, cette grosse femme et moi, pas partager les mêmes valeurs.
Enfin, je crois qu’elle a vomi avec une haine farouche, tout son répertoire de grossièretés en moins de 30 secondes ; une artiste de haut vol en matière de grossièretés, un vocabulaire hors pair, cette formidable acrobate de la langue française était certainement motivée par une crainte chronique de l’autorité, et peut-être même de se faire prendre justement, la main dans le sac avec mes misérables photographies ; et j’ajoute également, que cette formidable linguiste a développé une magnifique forme de racisme à notre encontre.
D’ailleurs, il n’y a pas de raison que les blancs soient systématiquement d’odieux racistes vis-à-vis des gens de couleur et qu’il n’y ait pas de réciproque comme dans le cas présent.
Cette mauvaise femme d’origine des Dom, d'une charmante couleur café au lait, avec l’accent français créole très prononcé, était admirablement, et dans toute sa splendeur, d’un racisme généreux et haineux.
Nous avions là, à faire avec une bonne grosse raciste, peu civilisée, qui déteste les petits blancs « esclavagistes » que nous sommes !
- Heum ! Pardon Madame, mais les Hongrois n’ont jamais mis personne en esclavage, alors l’amalgame est bien mal choisi.
Si au moins j’avais été noble Breton, mais non.
Alors c’est vrai, on s’étonne toujours de voir des gens de couleurs reprendre les attitudes des blancs abjects, mais comme ils souhaitent une parfaite égalité dans notre belle France, ce que je conçois dans notre démocratie, ils l’a trouvent également dans la haine et la connerie et moi, je ne suis allergique qu’à une forme d’humain, les cons et les femmes odieuses comme celle-là ! Maintenant que j'y pense, elle m'a peut être pris pour un Béké avec mon panama et ma chemise blanche, et son sang n'a fait qu'un tour, enfin, ceci n'excuse pas cela... Il se trouve que dans le cas présent, cette femme était créole, mais tous les créoles ne sont pas comme cette femme, que les choses soient claires, il s'agit d'un cas isolé, qui relève certainement de la psychiatrie, et ne faisons pas comme elle, l'amalgame.
Ah ! Nous vivons une époque formidable !