Petit retour en arrière : le 3 avril 2003, Gilles de Robien, alors ministre de l’équipement, présentait le nouveau dispositif en faveur de l’investissement
locatif. Ce qui allait devenir la célèbre loi Robien était basée sur le constat suivant qu'avait fait le ministre : "il est urgent de rendre le marché locatif plus accessible à tous les
Français quel que soit le lieu. C’est la condition même du développement harmonieux de nos agglomérations, du maintien de leur attractivité économique". En ce temps on ne parlait pas encore
de la France des propriétaires...
Quels étaient les grandes lignes de ce dispositif d'investissement ?
Le dispositif de Robien visait à soutenir l'investissement locatif dans le neuf grâce à un allègement d'impôts, à condition pour le propriétaire de louer le logement vide, à titre de résidence
principale, pendant au moins neuf ans. Le loyer, fixé par décret et réévalué chaque année au 1er janvier, était soumis à un plafonnement différent selon la zone géographique du
logement. L'avantage fiscal de la Loi Robien consistait initialement en un amortissement égal à 8 % du coût d'acquisition du logement neuf pour les 5 premières années. Et ensuite 2,5 % par
période de 3 ans et cela pour 6 ans maximum. Après 15 ans, vous pouviez amortir jusqu'à 65 % du prix de revient de votre bien...
Résultat des courses ?
En soi, l'idée était bonne... sauf que certains promoteurs ne se sont pas gênés pour en abuser : on a ainsi rapidement vu fleurir des constructions et ventes de logements surévalués, porteurs de
malfaçons, placés dans des zones peu attractives. Pour donner quelques chiffres, rappelons qu'entre 2003 et 2008, près de 350 000 logements ont été construits pour être vendus dans le cadre
du dispositif Robien, selon une estimation du Crédit foncier. L'offre locative devint ainsi rapidement supérieure à la demande dans une soixantaine de villes de plus de 50 000 habitants,
notamment Dijon, Le Mans, Perpignan, Mulhouse, Valence ou Clermont-Ferrand.
Ne trouvant pas de locataires et ne pouvant revendre à bon prix, beaucoup de petits investisseurs sont dans des situations délicates car ils ont perdu l'avantage fiscal. Ils viennent
donc grossir un peu plus la liste des surendettés à qui on a promis la lune (mars c'est pour bientôt paraît-il).
Arrive alors en 2006 Zorro sur son cheval blanc le ministre de la Cohésion Sociale Jean-Louis Borloo, qui a modifié les dispositions de
l'amortissement Robien pour l'adapter à la demande de logements et éviter les abus de certains promoteurs (avec le peu de succès que l'on sait). Les modifications portent sur
le dispositif fiscal d'amortissement du bien et sur un découpage plus précis de la France entrainant la création d'une 4e zone. Le régime Robien devient dès lors le « Robien recentré » : le
changement dans la continuité en somme !
La loi Scellier
Au même titre que les lois Borloo et Robien, la loi Scellier est un dispositif défiscalisant permettant aux contribuables d’alléger leur assiette fiscale tout en se
constituant un patrimoine immobilier. Concrètement, le nouveau dispositif s’adresse aux contribuables domiciliés en France se portant acquéreurs, entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre
2012, d’un bien immobilier neuf ou en Vefa (vente en l’état futur d’achèvement). L’achat de ce bien leur permettra de bénéficier d’une réduction d’impôt de 25 % du prix du logement destiné à être
loué, à hauteur de 300 000 €. À compter de 2011, la réduction d’impôt sera ramenée à 20%. Cerise sur le gateau, si la réduction fiscale accordée pour une année est supérieure à l’impôt sur le
revenu dû pour cette même année, le contribuable pourra imputer la différence sur le montant dû au titre des six exercices suivants. Ce dispositif est appelé à se substituer à ceux cités plus
haut (les dispositifs Robien et Borloo étant vouées à disparaître à la fin de l’année 2009).
La martingale immobilière?
Pas si sûr... Le Crédit Foncier vient en effet de publier une étude
complète sur les risques concernant les investissements locatifs en loi Scellier. Le quotidien Les Echos résume bien la situation : "Les garde-fous voulus par le gouvernement pour éviter au Scellier les mêmes excès que le Robien n'ont pas été mis en place. les risques de
déconvenues sont réels, selon une étude réalisée par le Crédit Foncier".
Pour résumer, cette étude du Crédit Foncier pointe les problèmes suivants des investissements en Scellier :
* Presque partout, les plafonds de loyers du régime Scellier sont nettement supérieurs aux loyers de marché pratiqués dans la région concernée ! Pour les logements de trois pièces et plus, les
plafonds sont 5 % à 35 % au-dessus du loyer de marché en seconde couronne d'Ile-de-France (zone A), par exemple, ou encore 30 % à 40 % de plus dans le Nord-Pas-de-Calais, le record étant de 45 %
à 70 % au-dessus du marché dans la zone A des Alpes.
* Le taux de rendement locatif brut dans le neuf ressort entre 4 % et 5 % (souvent 4,5 %), mais la rentabilité globale, en intégrant l'évolution de la valeur du bien, est nulle depuis un an pour
nombre de villes, voire négative (cas de Bordeaux et Toulouse). Comme je suis Mosellan, je précise que d'ici à juin 2010, le Crédit Foncier prévoit une rentabilité négative de 4 % environ pour Forbach...
* Enfin, l'étude publie une cartographie régionale des risques de l'investissement en Scellier (au sens de besoin locatif nul ou insuffisant). Pour les connaisseurs, 90 % d'entre elles se
trouvent en zone B2, 10 % sont en B1 et l'une, Annemasse, se situe même en zone A ! Vous trouverez cette carte ci-dessous :
[ Source : Etude Crédit Foncier 2009 ]