Salut, bande de cucurbitacées moqueuses
Dans les cuisines où se fait l’opinion, et ailleurs aussi, la pastèque a mauvaise presse. On la prend pour une grosse nouille, la pastèque. Pour une bonne à rien. Pour une pas grand-chose. Pour une bête boule, pleine de vide et lourde de rien. On la palpe en ricanant. On la croque méchamment. On l’oublie vite ensuite.
Il faut dire qu’elle manque de mystère, la pauvrette. Voyez ce physique mastoc et bonasse; cette pulpe insipide et pleine de flotte; cette chair cramoisie grêlée de vilains pépins en cascade. Même ses cousins melon et concombre gloussent dans son dos. Pas facile de naître pastèque. Non, Madame.
Or, c’est injuste. Car sous ses dehors idiots, la pastèque peut amener bien des satisfactions. Elle croque. Elle rafraîchit. Elle a un goût, aussi. Un tout petit goût. Mais un goût. Et puis, une sacrée couleur. Ce rouge hémoglobine, ce rouge passion humide, ce rouge luxure du Diable, ben, ce n’est pas de la gnognote chromatique. Hou, non.
Elle mérite donc mieux que les quolibets et les salades de fruits, que les railleries et les cocktails. Ben, ça tombe bien. Because l’autre jour, l’ami Dave nous a ramené d’un palace tunisien, où il avait soupé en brillante compagnie, une recette maghrébine drôlement affolante en bouche. Essayez donc cette salade de pastèque à la coriandre, oignon et ras-el-hanout et vous réévaluerez sans doute la plus couillonne des cucurbitacées.
Dans son panier, il faut un bouquet de coriandre, une pastèque bio de taille raisonnable, deux bulbes d’oignon frais et du balsamique qui ne pue pas le caramel. Sans oublier le ras-el-hanout. Soit ce vertigineux mix d’épices de là-bas, qui peut réunir une trentaine d’ingrédients dans sa forme originelle, mais ne se présente bien souvent sous nos cieux que dans une version simplifiée autant qu’édulcorée. Voilà. (Ce qu’on peut être sentencieux parfois)
Taillez la pastèque en cubes, en prenant soin de virer les pépins. Ce qui n’est pas une sinécure. Emincez l’oignon frais et le bouquet de coriandre. Touillez le tout. Arrosez d’une girandole d’huile d’olive et de balsamique. Salez, poivrez et ras-el-hanoutez avec vigueur. Gôutez. Recommencez. Plein de fois. Faut réveiller la grosse idiote qui pionce.
Oubliez une heure au frigo et dégustez avec des gens chers.
Au revoir
PS: Il y a de longues années de cela, un enfant observateur, planté devant la télé, avait dit ceci: «Mannix, c’est pas des couilles qu’il a, c’est des pastèques». Ça fait réfléchir.
PS2: On a aussi en stock une salade de pastèque façon thaï, qui arrache voluptueusement la goulette. Genre avec du piment, du gingembre, des radis et des cahouètes. Si trente lecteurs nous le demandent gentiment, on file la recette. Gratos.
LES COMMENTAIRES (1)
posté le 12 août à 16:32
Bravo pour le titre! Excellent! C'est la raison pour laquelle j'ai lu la recette, parce qu'effectivement la pastèque, depuis toujours, ne m'inspirait rien. Je vais essayer la recette. Bravo