Histoire: Quand la France lançait l'Europe spatiale

Publié le 04 octobre 2007 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com
SELECTION RELATIO SUR LE MONDE:"La France, lanceur de l'Europe spatiale",un article de Jean-François Augereau   l y a tout juste cinquante ans aujourd'hui, l'Union soviétique mettait en orbite le premier satellite artificiel de la Terre, Spoutnik 1, une boule creuse d'aluminium de 83 kilos dont le " Bip bip " allait, le lendemain, réveiller la planète... et humilier l'Amérique. La course à l'espace était lancée, que les Etats-Unis allaient gagner onze ans plus tard, en marchant sur la Lune.

Derrière les deux superpuissances de l'époque, la France du général De Gaulle va tenter de se faire une place. Dès 1961 est créé le Centre national d'études spatiales (CNES). Fort des acquis de la force de frappe, la France lancera avec succès, le 26 novembre 1965, le satellite Astérix, 42 kilos, devenant la 3e puissance spatiale mondiale. Un exploit qui lui permettra de jouer les locomotives dans la construction de l'Europe de l'Espace. Parfois à la hussarde.

Ces temps sont révolus. Certes, la France, forte des 32 milliards d'euros qu'elle a dépensés pendant les quarante premières années d'existence du CNES, est aujourd'hui encore la première puissance spatiale d'Europe. Sur les 1,4 milliard d'euros annuels de son budget, le CNES consacre 685 millions pour l'Agence spatiale européenne, (ESA), dont il demeure le premier bailleur de fonds.

Assurément, les ingénieurs français peuvent largement revendiquer le rôle de premier plan joué par le Vieux Continent sur la scène mondiale dans le domaine des lanceurs (Ariane), des satellites de télécommunications, de télévision directe, d'observation de la Terre ou de météorologie (Météosat, Spot, Envisat), des programmes scientifiques et d'exploration spatiale (Soho, Iso, Corot, Giotto, Mars Express, Cassini-Huygens).

Mais même si la France a donné une bonne partie de ses lettres de noblesse à l'Europe spatiale, son rôle est moins marqué. A cela deux raisons : d'une part, la stagnation du budget du CNES, à hauteur de 1,4 milliards d'euros donc, et ce jusqu'en 2012, d'autre part, la montée en puissance récente, en Europe, de l'Italie, de l'Allemagne, mais aussi le retour de la Russie, portée par la manne pétrolière.

Depuis Spoutnik, le paysage aérospatial a beaucoup changé. De nouveaux acteurs, de dimension potentiellement mondiale, sont apparus du côté de l'Asie : le Japon, la Chine ou l'Inde. De 2001 à 2005, suite à l'effondrement du marché des satellites de télécommunications, l'industrie spatiale européenne a du faire une sérieuse cure d'amaigrissement : les effectifs ont fondu de 15 %, le chiffre d'affaires a chuté de 20%.

Depuis 2006, on assiste à une timide reprise. Elle profite à Arianespace, leader mondial des lancements commerciaux de satellites, et à son lanceur Ariane 5. Mais les Etats-Unis, ont pu lisser les effets de cette crise mondiale grâce aux commandes de ces satellites militaires et gouvernementaux qui font tant défaut à l'Europe.

Washington consacre chaque année quelque 40 milliards de dollars (28,2 milliards d'euros) à l'espace, activité militaire comprise, quand l'Union européenne ne réunit qu'un peu plus de… 3,5 milliards d'euros, pour l'essentiel destinés à l'ESA. L'Europe investit quatre fois moins que les Etats-Unis dans le civil et… vingt fois moins dans le militaire ! Difficile, dans ces conditions, de pouvoir tout faire.

Face à la montée lente mais inexorable des grands pays d'Asie, l'Europe spatiale doit se doter de nouveaux moyens et explorer de nouvelles voies. Dans ce contexte, elle ne manque pas d'atouts, maîtrisant la plupart des technologies. Le succès de ses entreprises – EADS, Astrium, Thales-Alenia, Alcatel, Finmeccanica, Arianespace – ceux de ses programmes scientifiques, et l'envoi dans l'espace de ses 31 astronautes (dont 9 " spationautes " Français) en témoignent.

Reste que l'incapacité de l'Union européenne à avancer sur un dossier stratégique et économiquement important comme Galileo, le concurrent du GPS américain, n'est pas de nature à rassurer. D'autant que, lors des conférences internationales qui réunissent les 17 Etats-membres de l'Europe pour définir l'avenir de l'espace européen, on assiste, parfois, plus à une convergence d'intérêts divergents et nationaux qu'à la mise en place d'une politique commune.

Jean-François Augereau


Les satellites omniprésents dans notre vie quotidienne

Depuis la mise en orbite de Spoutnik 1, en octobre 1957, plus de 5 000 satellites ont été lancés dans l'espace. La plupart l'ont été par les Etats-Unis et l'ex-Union soviétique, la Chine, l'Europe, la France, le Japon et l'Inde arrivant loin derrière. Environ 2 000 sont encore en orbite. Certains frisent des records comme le satellite américain de télécommunications, aujourd'hui muet, Telstar 1, lancé en juillet 1962. D'autres se font discrets comme les satellites militaires, qui constituent le gros de la troupe, ou se montrent curieux, comme la petite minorité des satellites scientifiques qui scrutent la Terre et le ciel et explorent le système solaire. A ces deux grandes catégories, fruits des politiques spatiales gouvernementales, s'en sont ajoutées d'autres, plus civiles, qui ont envahi notre quotidien.

- Les télécommunications et la télévision directe. Même si la plupart des télécommunications mondiales transitent par des réseaux de câbles terrestres, une partie du trafic est relayée par des satellites de plusieurs tonnes, géostationnaires (installés à 36 000 km d'altitude), sans lesquels la future téléphonie mobile, le haut débit, la télévision directe à haute définition, l'éducation en zone défavorisée ou la télémédecine ne pourraient se développer.

- La météorologie. La mise en orbite de leur ancêtre, Tiros 1, remonte à avril 1960. Aujourd'hui, ils sont incontournables pour faire de la prévision météo à sept jours, surveiller la bonne santé de la planète et observer les conséquences du réchauffement.

- L'observation de la Terre. Directement dérivés des programmes militaires, ils sont les yeux de la planète et un outil indispensable pour la mise en place d'un développement durable. Capables de voir à 800 km de distance des détails de 50 cm, ils permettent de prévoir les récoltes, d'identifier des gisements de matières premières, de surveiller la pollution ou de localiser les plantations de coca et de pavot, pour la lutte anti-drogue.

- Le GPS. Hier réservé aux militaires et à quelques rares privilégiés – scientifiques, géologues, pétroliers, cartographes... –, le GPS est désormais partout. Assuré par une constellation de satellites militaires américains (Navstar), ce service, aujourd'hui largement ouvert au public, ne cesse d'étendre ses applications sur l'ensemble de la planète : localisation, guidage, gestion de trafic, aménagement du territoire, etc. L'Europe tente actuellement, non sans difficultés, de mettre en place son propre système, Galileo.

J.F.A.