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Mon métier va disparaître (et c’est bien dommage)

Publié le 28 juillet 2009 par Uninfirmier

c3po Si on considère que mon métier consiste à vérifier du matériel et à remplir des seringues, je suis foutu. Et comme la Société Française d’Anesthésie et de Réanimation considère que c’est l’essentiel de mon métier, je suis foutu.

Parce que d’une, le matériel se vérifie tout seul, merci, et il le fait beaucoup mieux que moi. Il y même des bidules qui poussent le vice jusqu’à détecter leur propre péremption: “Ah non-non-non, je démarre pas. j’avais dit 100 utilisations, ça fait 101, non-non-non.” Alors bien sûr il reste du matos un peu débile, même pas foutu de savoir si oui ou non il fonctionne correctement, mais ça devient rare au bloc. La plupart chantonnent plus ou moins gaiement selon leur humeur et leur état. 

Alors il me restait les seringues. Avec comme activité centrale, prélever des litres de Propofol, le médicament-tueur-de-chanteurs. Et là, le coup de grâce. Un robot, un moche robot en plus, qui prépare les seringues tout seul. Et qui, tout fier, les envoie par pneumatique au service concerné.

Je vous laisse admirer la bestiole et ses mouvements si grâcieux ICI.

Alors, forcément, il prend un peu de place. Beaucoup, même. Il travaille dans une espèce de cabine téléphonique qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler certaines salles de détente hospitalières. En plus, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais il ressemble comme deux gouttes de sérum phy au robot peintre des usines de voitures. Il y ressemble tellement que ça en devient louche. Vous allez me dire que je suis jaloux, mais quand même. En plus, il met des plombes pour remplir une pauvre seringue, probablement autant que pour peindre une Twingo. Alors que moi clac, glou-glou, c’est fait. Mais je bois des litres de café et je fais des pauses. Lui, il ne se plaint jamais et ne pique pas Closer aux panseuses.

Mouais. Je vais vous en sortir, moi, du robot pas cher, du droïde d’anesthésie avec juste 3 phrases-type*:

Phrase de bienvenue : Vous êtes bien à jeun? Rien-bu-rien-mangé-rien-fumé? ouvrez grand la bouche…Mmmmhh…”
Phrase d’induction:Gonflez bien les poumoooooons, pensez à quelque chose d’agréaaaaaaable…
Phrase de réveil: “C’est fini, c’est fini, tout va bien, c’est fini, tout va bien, c’est fini, on va vous enlever le tuyau qui vous gêne”

Le modèle prémium aurait une option supplémentaire spéciale fin d’après-midi, contexte: programme merdique – anesthésiste merdique:

Phrase de bienvenue n°1: “C’est elle la vulvoplastie? Ah merde, elle a pas de menton et elle est… Vous pesez combien Madame? Non, mais pour de vrai?”
Phrase d’induction: “Oh Martine, tu peux rappeler le chir et lui dire qu’on a commencé ? Quel connard celui-là… Elle dort, là? Non? Ah bon.”
Phrase de réveil: “OUVREZ LES YEUX! Respirez, mais RESPIREZ! Non, ne BOUGEZ PAS! Non, c’est MOI qui l’enlève le tuyau!”

*Phrases parfaitement authentiques, bien entendu, ce sera précisé sur la notice.

Pour revenir à notre robot d’origine, je ne vais pas disparaître tout à fait. Déjà parce que je me suis dégotté un autre boulot où je suis payé pour écrire, et d’autre part, parce que je considère que mon métier c’est autre chose que de remplir des seringues. C’est aussi remplir des tiroirs.

Bon oui, je suis un peu aigri. Ce doit être le temps, il fait trop beau pour être éclairé au néon.


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