Flashmob ou la communauté des anonymes

Publié le 28 juillet 2009 par Gregory71

Il n’y avait là que la réunion de l’acte. Elle n’avait d’autre objectif que de constituer un devenir fluide, fragile, faisant acte d’une communauté temporaire qui n’avait d’autre fonction que cet instant.
Une personne commencait et donnait le signal d’un départ que les autres suivaient. Il y avait l’acte, peu importe lequel, un acte partagé, un acte fait à plusieurs. Il y avait l’acte de chacun, l’acte de l’ensemble, les deux visions coexistaient indissociablement. Cela durait un certain temps. Ils étaient au milieu de la foule et parvenaient, de part leur nombre, à être une autre foule, non plus seulement indifférente les uns aux autres, mais faisant quelque chose ensemble au sein même de l’anonymat, puisqu’ils ne se connaissaient pas. Ils étaient une foule dans la foule, ils y appartenaient donc et ne répondaient pas au désir d’être une élite mais plutôt d’organiser autrement l’anonymat de facon passagère.
Puis, moment sublime, il y avait la dislocation, chacun repartait de son côté comme si la communauté de l’acte n’avait eu d’autre raison d’exister que l’acte même, elle ne se réifiait pas en une identité, en la constitution d’un groupe survivant à sa fondation. Chacun repartait donc de son côté, laissant la mémoire de cette action à ceux qui l’avaient observés, déléguant donc l’avenir de la communauté à la fragilité d’une mémoire existentielle. Nous en étions dépositaires.