Plus qu’un formidable terrain de jeu pour les adeptes de sports extrêmes, Le TAZ est aussi un organisme à but non lucratif (OBNL) créé en 1996 dont la mission citoyenne se poursuit encore aujourd’hui. Un skatepark peut-il être socialement responsable et engagé?
«Nous nous retrouvons avec un nouveau TAZ entre les mains et surtout, nous sommes 8 ans plus tard. Tout est à revoir du côté de l’intervention », explique-t-elle d’entrée de jeu.
Un seul aspect de l’ancien Tazmahal s’est, selon elle, transmis vers sa réplique actuelle située dans le Complexe environnemental de Saint-Michel. «On vise toujours la cohabitation entre les différentes pratiques, ainsi que la cohabitation entre l’esprit jeune du sport extrême et les familles qui viennent dans notre édifice.» Marianne mentionne la différence entre Le TAZ et d’autres skateparks qui donnent des plages horaires fixes selon chaque pratique sportive (skateboard, patins, BMX). Cette façon de faire a ses avantages, comme par exemple d’éviter les confrontations entre athlètes de sports différents, «une guerre qui a toujours existé. Mais c’est justement le genre de défi qu’on recherche au TAZ. On veut créer une communauté plus large, favoriser le respect.»
Ainsi, dans le skatepark, environ six surveillants, techniciens et intervenants sont à l’affût en tout temps. La plupart d’entre eux patrouillent en patins ou en skateboard, une façon de se fondre dans le décor. Leur travail consiste à assurer la sécurité (port d’équipements de protection, circulation) et de gérer les conflits qui peuvent survenir sur les plateformes: les skateboarders et les patineurs qui trouvent que les BMX prennent trop de place et vice versa, les débutants qui ne savent pas circuler dans le skatepark, les plus expérimentés qui prennent trop d’espace et circulent dangereusement se croyant tout permis, des jeunes qui se frustrent parce qu’ils peinent à réussir un truc. «Notre but est de ramener le calme, sans prétendre que l’incident n’a jamais eu lieu. On veut générer la bonne humeur et l’ouverture d’esprit de la part de tout le monde.»
Approcher l’autre
À ce travail général s’ajoute une intervention plus personnalisée. Marianne Vilandré-Côté dit porter une grande attention à cet aspect de son travail. «Je me sens portée vers ceux considérés comme des ‘‘cas à problèmes’’. Dans mes expériences antérieures comme intervenante, j’ai tellement appris d’eux.» Elle souligne le défi de créer un lien de confiance avec certains de ces jeunes. «Ces cas-là ne se règlent pas en claquant des doigts. Ça implique un travail à long terme. Ce que je préconise, c’est de leur donner des objectifs pour les faire revenir. Un jeune peut manquer de motivation à l’école, mais être vraiment branché dans un skatepark. Si venir ici le valorise, tant mieux!»
Une méthode qui roule
Les méthodes d’intervention ne sont pas établies de façon systématique au TAZ. Elles ne l’ont jamais vraiment été d’ailleurs. Le personnel du centre cherche plutôt à utiliser la force du milieu du sport extrême et l’intérêt qu’il suscite chez les utilisateurs pour intervenir.
«À l’époque, ma drogue, c’était Le TAZ! L’endroit a vraiment changé ma vie. Il m’a permis de m’épanouir dans le bon sens du terme. Ça aurait été tellement facile de déraper avec les tendances que j’avais», se souvient l’ancienne rebelle devenue intervenante. Même son de cloche chez Stéphane Julien, utilisateur de longue date du TAZ et aujourd’hui patineur professionnel: «Le temps que je passais ici quand j’étais jeune, c’est du temps que je passais à ne pas faire de conneries. Ou du moins, des conneries qui auraient pu me coûter cher!» Ces deux personnes sont la preuve vivante que l’intervention, ce n’est pas tout. Seule la force d’un milieu bien exploitée peut faire la différence.
Reflet de Société, Vol. 18, No. 3, Juin/Juillet 2009, p. 14-15