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J'aimerais tant voir Syracuse

Par Crapulax

Titre trompeur car c'est bien vers l'ouest que nous avons finalement mis le cap. Nous rejoindrons GG aux Iles Aeguades vers le 30/31 et cheminerons ensemble vers Malte où ma mère atterrit le 2/08.

linge

Nous touchons la Sicile à Cefalu au crépuscule. Je ne résiste pas à l'envie d'aller à terre pendant que le reste de l'équipage dort. Mon enthousiasme est un peu rincé par la concentration touristique et l'inexistence de troquet où il est encore possible de prendre une bière au comptoir. De jour, la situation est un peu moins critique. Cefalu est surtout une excellente escale pour rayonner en Sicile par la terre et pour profiter de la laverie toute proche, prestation inconnue depuis plus d'un mois. Si mon hygiène approximative me rend autonome pour longtemps, si BY s'est bien adaptée à une certaine austérité vestimentaire, nos deux petits crados restent de grands consommateurs de vêtements surtout depuis que nous naviguons au pays merveilleux des Gelati et autre Granite dont les tee-shirts profitent autant que les enfants. Trois machines plus tard, Galapiat est redécoré en radeau de la méduse dans le plus pur « Napoli Style ». L'étouffant Scirocco assure un séchage parfait et l'équipage du très british et impeccable sloop en bois qui mouille à proximité détourne son annexe pour filmer les romanos de la mer tandis que nos deux petits culs nus dansent sur le pont. J'ai manqué d'à propos, j'aurais dû leur faire payer la visite. Pas de petits profits pour des trampers.

Heureux concours de circonstance, j'apprends que mon ex-collègue et surtout ami, Pierre, passe une semaine vers Syracuse. C'est justement notre objectif principal de ces deux jours à terre. Si le port de Cefalu est sinistre, il a le mérite d'être abordable, chose rare en Italie. Aussi, nous écornons notre budget pour offrir une

gangi

nuit d'hôtel à notre canot et partir pour deux jours à bord d'une minuscule voiture de loc' jaune d'oeuf que je décris abusivement aux enfants comme une voiture de course. Routes sinueuses dans les Madonies. Je m'inquiète un peu quand Thao, après seulement 10 bornes ( il y en a 200 à faire...!!), se plaint d'être malade. Un granite plus tard à Catelbueno et il n'y paraît plus. Parenté méditéranéene évidente avec ce que j'ai pu expérimenter, parfois, je me crois sur les hauts plateaux d'Anatolie, en route pour la Cappadoce. Caractère sicilien unique des villages dans lesquels nous marquons une pause, tel Gangi, termitière isolée accrochée à sa montagne, dont les rues médiévales vides réservent des poches de vie improbables comme cette fête des enfants, sono saturée par du rock assourdissant qui ne semble pas gêner les vieux du village, jeunes acnéiques sur-testéronnés  en train de massacrer une cible de fléchette ou de s'acharner sur le panier de basket. 100 m plus loin, C'est à nouveau le désert.

Plus tard, nous retrouvons Pierre, Emma et ses enfants dans un Fort Knox du tourisme. J'ai connu Pete Ze Dick lors de ma dernière incursion dans l'univers productif, une lointaine planète aride proche de la défense que quatre semi-dieux aussi implacables et vengeurs que ceux de l'ancien testament tiennent d'une main de fer. L'omission de la cravate y est puni par une lapidation en place publique. Un jour, j'ai déserté en faisant le mort sur le champ de bataille tandis que de plus vaillants, comme Pierre, continuaient le combat. Les nouvelles du front ne m'intéressent guère. Il semble que la situation se crispe encore un peu plus mais nous avons de plus agréables sujets à aborder. Pierre et Emma sont les premières personne que nous retrouvons depuis notre départ. Nous ne pouvions pas être plus chanceux et dégustons ce privilège aussi imprévu que délicieux.

syracuse

Nous filons ensuite vers Syracuse où le premier Bed & Breakfast dans le centre historique fait parfaitement l'affaire. Populaire, vivante et sans âge car elle les a tous traversés depuis Platon, Syracuse entre immédiatement au Panthéon de mes villes favorites. Nous n'avons malheureusement pas pu profiter de l'effervescence brouillonne du samedi soir. La fatigue de la journée et surtout l'excellent restau où nous avons posé la famille nous a achevés. Ambitieuse, j'avais envie de manger à l'italienne mais après les antipasti, nous étions déjà calés. Le primi aussi merveilleux soit il, nous a fait plier le genou, quant au secondi, à peine si nous avons pu y toucher. Levés à 7h, nous déambulons dans une Syracuse vide et irréelle. Dans ma tête, Henri Salvador chante Syracuse en boucle. Sa rengaine si ringarde et si belle m'a toujours intriguée. Pour la première fois depuis la Turquie, je me vois bien acheter une de ces jolies ruines à 50 K€ près d'un Pallazo. J'y écrirais, irais manger la pasta à la trattoria du coin agrémentée d'un petit Limoncello digestif.  Je divague....

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Nous terminons notre virée terrienne par Notto, village ultra baroque et superbe où seuls des touristes comme nous peuvent se trouver dans la rue un dimanche à l'heure de la sieste. Non, ce n'est pas un décor de Cineccita que nous aurions loué pour l'occasion. Non, nous ne sommes pas assez illustres pour que la ville nous soit réservée. Toujours est-il que nous sommes seuls, seuls à errer dans ces étranges perspectives est-ouest, dessinées il y a trois siècles pour que le soleil éclaire chaque rue à toute heure de la journée. Drôle d'idée dans un pays où on cherche plutôt l'ombre....

Ewen, « Il Piccolino », ce goinfre, parvient encore à se faire offrir une glace gratuite sans compter celle qu'il négocie habilement pour son frère auprès d'un commerçant sicilien à priori austère et dont les affaires vont pourtant mal si j'en juge à la pancarte "Vendesi" de sa boutique. Fatigués par ces deux jours intenses, nous reprenons l'autoroute pour retrouver Galapiat. Il est temps car arriver day 1 à 8h et repartir day 2 à 19h n'est pas particulièrement apprécié. Ça casse un peu la rentabilité portuaire.

Arrivés aujourd'hui en fin d'après-midi à Palerme, nous avons la chance de trouver une place au vieux port, en plein centre, plutôt que d'être relégués dans une nouvelle marina excentrée. Pas de place passager mais le Yacht Club Del Mediterraneo - Associzone sportiva dilletantistica (J'aime le dernier mot), nous accueille merveilleusement. L'adipeux préposé sicilien au sourire inversé à la De Niro est aussi lent qu'attentionné. Palerme la déglingue nous attend. Ici le Tiers monde, 100 mètres plus loin, Palazzo et cathédrales. On y sert des Kwak à la pression et quand une fringale nocturne vous prend comme celle dont je reviens, la délicieuse Calzone et la grande bière dans une gargotte animée aux néons blafards n'excèdent pas 5€. Bien, bien... bien.   


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