Alors que je discutais avec l'un des organisateurs, Aurélien Lévy, et que nous
évoquions justement la mode actuelle des rencontres entre acteurs du Web, je me
suis pris un flash de dix ans dans la vue et me suis retrouvé au Sous-Bock
Taverne pour une des premières rencontres de la jeune communauté Mygale.
Mygale fut l'un des premiers hébergeurs gratuits en France, arrivé sur le
« marché » un peu par inadvertance en 1996. C'était en effet au
départ un projet universitaire, mené par Frédéric Ciréra. Chacun avait droit à
5 Mo et on pouvait ouvrir son compte uniquement par cooptation au départ, pour
mieux gérer la montée en charge, je suppose.
Assez rapidement, l'idée a émergé de susciter une rencontre physique entre
mygaliens. Je m'y étais rendu avec ma copine de l'époque (qui est devenue
depuis la mère de mes
enfants, étonnant, non ?) pour représenter le site que nous animions :
Le Poulpe sur la
Toile. Nous étions dans nos petits souliers, au milieu de cette foule de
primo-geeks qui semblaient tous se connaître. Première impression évidemment
fausse (mais habituelle lorsque l'on déboule en retard dans une soirée et que
l'on ne connaît personne), puisque la première question posée aux nouveaux
arrivants était invariablement : « c'est quoi ton login ?
».
C'était l'époque du Manifeste pour un Web indépendant. Les premiers webmasters
de « sites perso » pressentaient en effet qu'en coulisses les grandes
manoeuvres avaient déjà commencé. Arno* venait de lancer Elysee.org, parodie hilarante et réussie qui s'ouvrait sur la célèbre
phrase de notre ancien président « ça m'en touche une sans faire bouger
l'autre ». Tout le design consistait en un détournement du graphisme officiel.
L'exploit avait donc sa place dans les conversations de la soirée. Le Web 1.0
se vivait à fond et l'Ajax ne manquait pas trop pour susciter de belles
rubriques contributives.
D'autres rencontres eurent lieu, au théâtre notamment. Quelques années après
les premiers pic-nics du Well (Whole Earth 'Lectronic Link) en Californie, les
pionniers français posaient les premiers jalons de ce que l'on appelle
aujourd'hui les réseaux sociaux.