Il y a 25 ans, je terminais mes études de finance du côté de Jouy-en-Josas. Un des problèmes classiques d'évaluation des choix d'investissement était le cas "Container". Il s'agissait d'apprécier la rentabilité d'un investissement dans un container, loué ensuite à un exploitant qui versait un loyer au propriétaire. Comment financer, quels montants de loyers, quelle valeur résiduelle, quel taux d'actualisation, telles étaient les données du problème.
Aujourd'hui, on nous propose d'investir dans des panneaux solaires, et de gagner de l'argent avec le prix de vente de l'électricité, garanti sur longue période par EDF. Certains annoncent 8% de rentabilité, d'autres 20% !
Quand on creuse un peu, on s'aperçoit que le taux annoncé est un taux apparent, rapportant le montant des ventes prévues sur une année à l'investissement. Cela n'a bien sûr rien à voir avec un taux de rendement interne.
Pour calculer ce taux, il convient de modéliserles flux financiers, en montants et dans le temps.
Le prix de vente de l'électricité est garanti aujourd'hui sur 15 ou 20 ans par EDF, mais rien ne dit que ces prix ne seront pas modifiés. La quantité d'électricité produite dépend du taux d'ensoleillement, qui peut varier, ainsi que du rendement des panneaux, dont la qualité peut se dégrader et qui nécessiteront des travaux d'entretien.
Si le vendeur-installateur vous garantit un prix de rachat des panneaux dans 15 ou 20 ans, quelle certitude a-t-on qu'il tienne son engagement; a-t-il une caution bancaire ?
Enfin, quel taux d'actualisation choisir ? Je suggère d'estimer, sur longue période et en fonction des informations disponibles, l'écart-type du taux d'ensoleillement, et de le rapporter à la volatilité du marché actions, afin d'estimer la prime de risque adaptée.
Il est par ailleurs piquant de constater que les technologies vertes rendent à ce point dépendant des aléas climatiques, comme une vulgaire céréale. On a vu par exemple l'an dernier les producteurs d'électricité éolienne lourdement pénalisés par l'absence de vent à l'automne en Allemagne. L'impact sur ces sociétés cotées a été redoutable.
Certains vendeurs proposent de plus des montages fiscaux acrobatiques, en utilisant le statut LMNP. Gageons que l'administration fiscale sera d'autant plus regardante que les investissements vont se multiplier; les exagérations seront lourdement réprimées au titre de l'abus de droit.
En conclusion, il convient de faire preuve de bon sens et de prudence dans la modélisation des flux, d'évaluer le rendement avant tout avantage fiscal, et de comparer les niveaux de risque. Gardons à l'esprit que pour tout investissement, la rentabilité sert en premier lieu à rémunérer le risque.