Dans Manpower, il y a power (et man). Il est question, en effet, d'une troupe de bonshommes dont le métier est de réparer des cables électiques, perchés en haut de pilones en feraille. A tous les coups, ça ne rate pas une seule fois, quelqu'un tombe ou se prend une décharge. Pas facile, la vie des power men. Alors pour oublier, c'est une autre forme d'énergie, plus anarchique, qui se déchaîne. Deux d'entre eux sont ivres en permanence et font toutes les idioties possibles, les autres rient gras, s'engueulent parfois, se battent souvent.
Puis quand Marlene Dietrich débarque, c'est une autre forme de tension qui s'installe. Face à elle deux camarades, Edward G. Robinson, un petit trapu un peu pataud, et George Raft, un Humphrey Bogart trop lisse, presque efféminé. Cette polarité définira le reste de l'intrigue, le premier se marriant avec la femme convoitée, demi-mondaine en quête d'enbourgeoisement, et le second cultivant ses sentiments avec des bonnes charges d'amour vache. Le visage décharné de Dietrich, ses yeux et son allure de femme fatale, savent très bien maintenir la tension.
Raoul Walsh a réussi, dans Manpower, a faire de cette atmosphère électrique un milieu naturel. On ne sait plus si ce sont les hommes ou la nature qui se déchaînent. Et le film y gagne un côté sauvage, gratuit, comme toutes ces bagarres qui éclatent sans véritable raison, pour l'amour de la castagne.