Les Monts de l'Eléphant est un merveilleux roman. Ni plus ni moins. C'est une histoire qui s'adresse à Promesse, contée par Henri de Lespagne, fils de bonne famille qui occupe un appartement cossu de l'avenue Kléber.
Avec tendresse et nostalgie, Henri revisite son passé et son enfance, pas si dorée que cela. Son père a été frappé d'une maladie mentale peu courante, diagnostiquée trop tard, et qui fragilisera les rapports déjà peu chaleureux entre les membres de cette fatrie.
La mère, Anne de Lespagne, née de Castries, est une femme qui ne supporte pas le désordre. Elle met de côté son sentimentalisme et ses élans d'affection, à la place elle manie le sarcasme avec une dextérité paralysante.
Les conséquences sur la famille seront sans appel.
Henri, né en 1960, est désormais un homme rompu et déboussolé. Enfermé dans ses souvenirs. Handicapé de son enfance. Promesse est une femme qu'il va rencontrer tardivement, dont l'histoire personnelle est encore plus bouleversante que les 150 pages de la saga de Lespagne, mais les deux histoires se font des appels du pied, discrètement et solennellement.
C'est un roman très beau, très touchant et drôle aussi (le type au nougat, hilarant !). C'est un livre qui sait nous surprendre, nous faire attendre aussi, l'arrivée de Promesse est un fil rouge, vécu comme une promesse justement, car son récit arrive dans les toutes dernières pages.
J'avais depuis très longtemps envie de lire ce roman et je suis ravie de cette découverte. Il me reste à lire les autres livres de ce Jean-François Chabas, en me souhaitant d'autres émerveillements.
Et bien entendu, ce roman ne se destine pas qu'à la jeunesse.
Médium de l'Ecole des Loisirs, 2009 - 160 pages - 9,50€
Tu sais, les familles... c'est un drôle de truc, les familles. Tu les regardes de loin et tu vois un groupe à peu près uni, tu te dis que les membres se ressemblent forcément, puisqu'ils sont du même sang, qu'ils grandissent ou vieillissent côte à côte... Et puis tu regardes de plus près les individualités, et tu te rends compte qu'ils peuvent différer les uns des autres à peu près autant qu'une carpe miroir, une crosse d'évêque et une pompe à vélo.
Une famille, ce n'est pas un puzzle. C'est plutôt une tas de bidules et de machins balancés ensemble dans une caisse, et plus ou moins forcés d'y cohabiter. Il y a une question de chance. Je veux dire que tu peux tomber sur des parents aimants, merveilleux, et qu'avec tes frères et soeurs, c'est aussi un peu la roulette. Nous connaissons tous des familles où on se hait, d'autres où on s'adore. Certaines où des clans se forment. Certaines dont les membres choisissent un mouton noir, un paratonnerre qui reçoit toutes les rancoeurs, les jalousies et les hargnes recuites.
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