Dans la cour du musée Calvet, les lectures se suivent, tous les matins à 11h. Aujourd’hui et demain, c’est Wadji Mouawad à l’honneur (artiste associé du 63ème Festival oblige).
Ce matin, le texte lu était “ Silence d’usines : paroles d’ouvriers“, des entretiens recueillis auprès d’anciens ouvriers de l’usine Philips d’Aubusson par Wadji Mouawad, en 2004. En effet, en 1987, l’usine Philips d’Aubusson fermait ses portes et laissait sur le carreau 300 ouvriers.
Ces conversations ont été enregistrées puis retranscrites et soumise à l’approbation de chacune des personnes interrogées. Les textes que nous avons entendus, pour cette raison, conservent la sincérité du témoignage.
La façon de procéder de W. Mouawad est toujours la même. Les personnes déclinent leur identité, puis les prénoms de leur parents, de leurs grands-parents quand c’est possible. Une façon de dessiner le personnage, de comprendre d’où il vient, avant d’entrer à l’usine. Là, ils expliquent la tâche qu’ils accomplissaient, 45h par semaine dans les années soixante,-quand ils ne devaient pas revenir travailler le samedi matin, si on le leur demandait. W. Mouawad qui a dit en préambule à la lecture qu’il ne connaissait rien du monde ouvrier, leur pose systématiquement la question de savoir à quoi il pensaient pendant de si longues heures à leur poste de travail. Peu de réponses… L’ambiance de l’usine, une espèce de grande famille, les oeuvres sociales, le sport, sont évoqués. Puis vient la date fatidique. “Un coup de poignard” comme dit une des interviewées. Et après… Le reclassement, plus ou moins difficile, une chance a posteriori pour certains qui ont donné une autre orientation à leur vie, une brisure irréparable pour d’autres.
À la fin, à chacun, W. Mouawad dit : “Au fronton de vos mairies, trois mots symboliques de votre République sont écrits (je rappelle qu’il n’est pas français, que la France ne lui en a pas donné le droit), Liberté, Égalité, Fraternité. Lequel vous semble-il le plus en danger ? ” Majoritairement, il est répondu : l’égalité.
Deux acteurs Patrick Le Mauff et Nathalie Bécue lisent les paroles d’ouvriers, W. Mouawad interprétant son propre rôle, celui de l’interviewer.
Dans le public, des anciens de Philips étaient venus assister à la lecture, avaient fait le voyage d’Aubusson, uniquement pour cet événement.