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Label : Southern LordSortie :18 Mai 20091,5/5Longtemps, je me suis couché de bonne heure et je me suis demandé pourquoi Sunn O))) était un groupe aussi nul. C'est pas que j'aime pas le drone, mais j'ai toujours trouvé leurs longues grosses notes graves qui bourdonnent aléatoirement un peu chiantes, et c'est pas faute d'avoir essayé plusieurs albums. C'était presque une blague pour moi ce groupe, à chaque fois que j'entendais un son régulier grave dans la rue, je disais "han, quelqu'un écoute du Sunn O)))" (je riais seul). Alors quand on a présenté Monoliths & Dimensions (ce titre...) comme étant l'album "orchestral" de Sunn O)))), avec des critiques enthousiates dans Wire, j'ai eu un genre d'espoir : un album de drone qui mêlerait grosses guitares et orchestrations de l'enfer? Mais bien sur! Ce sera pas ce qu'on écouterait avant d'aller se coucher, mais il y avait là un créneau génial très peu exploité qui lierait dans un même ensemble le doom et la musique contemporaine. J'y croyais vraiment.Et j'y ai cru encore pendant 5 minutes à la première écoute. 5 minutes et 38 secondes pour être précis. Parce que Aghartha, morceau assez classique dans l'absolu, commençait bien, c'était assez prenant, c'était dense et ample, il se passait quelque chose. Et puis patatras. Chassez le naturel, il revient au galop. Vous imaginiez Sunn O)))) parti dans des territoires modernes et originaux? Et les revoilà qui se remettent à faire les cons, les voilà encore repartis à se prendre pour des putains de vikings de l'enfer, et voilà une grosse voix grave qui fait peur qui vient tout simplement détruire le morceau, le rendre passablement affreux, façon gros métal qui tache. Je venais juste de rentrer dans le morceau, et voilà que ces cons en capes se croient en live à Stonehedge et se mettent à faire "Beuuuuu" en infra-grave, se raclant la gorge pour faire peur et racontant une histoire qui semble assez longue mais que j'ai pas eu envie de comprendre, parce que les audiobooks doom metal, très peu pour moi. Sérieusement. Dites moi Sunn O)))), pourquoi vous avez fait ça hein? Pourquoi vous avez fait ça sur 3 des 4 morceaux de l'album le coup des grosses voix graves qui vous font remonter les glaires? Vous allez me dire "oui, mais c'est pas ton background le metal, tu peux pas comprendre, pour nous autre qui avions des sweet shirt noirs à 18 ans en s'écoutant des trucs bourrins, ça passe très bien cette voix". Soit. Mais il faudrait donc forcement avoir eu une adolescence de merde pour aimer cet album?Non mais plus sérieusement, Aghartha, à la fin, avec les violons dégueulasses, les bruits de bois qui craque, ça, c'est excellent, mais y'a cet espèce de faux-druide qui me vibre dans le tympan, et qui fout tout en l'air. Même un solo de kazoo, ça aurait été mieux. Et sur Big Church, avec ses choeurs féminins un peu kitschs mais cools, c'est pareil, revoilà les barbares qui braillent et qui foutent en l'air un morceau pourtant bien parti (même si le coup des sons de cloches, c'était peut être un peu too much). Et je vous parle même pas de Hunting & Gathering (Cydonia), morceau quasiment schizophrène, où se côtoient d'un coté l'horreur absolue (les "beuuuuaaaa" du chanteur, des synthétiseurs impossibles qui viennent des années 80) et les grandes idées (les trompettes de l'apocalypse, les gros riffs sales).Alors finalement, il nous reste quoi? Il reste Alice, qui est sûrement le morceau pour les gens qui n'aiment pas Sunn O)))))), le seul qui peut leur faire plaisir après 30 minutes de chevelus qui geignent. Déjà, ça a le mérite d'être instrumental, comme un éclair de lucidité. Et puis le morceau en lui-même est peut être celui qui justifie tout Sunn O))))))))), tout leurs albums chiants. Beaucoup plus vide et atmosphérique, on pourrait voir cette composition comme une longue traversée depuis les ténèbres jusqu'à la lumière céleste : ça commence par des guitares lointaines, douloureuses, qu'appuient des arrangements destructeurs mais beaucoup moins sombres qu'auparavant, et petit à petit, ça progresse, le drone se met en place, des sons apparaissent dans l'atmosphère pesante mais à la fois quasiment... épique. La progression est remarquablement conduite, les instruments à vent prennent une place de plus en plus grande, se mélangent, s'envolent, on a comme des frissons, et comme un dernier miracle, le morceau de s'achèver dans une douce clarté inattendue, baignée de harpes enchanteresses, des petites mandolines et d'improvisations au trombone, et c'est absolument magnifique. Alors forcement, quand, au sortir de ce morceau, on réécoute le reste de l'album, on est amer. Mais peu importe, ils peuvent retourner à leurs incantations post-pubères de metalleux, il reste Alice, la meilleure chose qu'ils ont jamais faite.Ça donne donc un album auquel je donne presque la moyenne, mais surtout grâce à Alice, car, si on voulait être honnête, franchement, ça reste à 3/4 un bon gros gâchis de talent à cause d'une espèce de fascination complètement ringarde et quasiment hilarante pour un coté "druide" dont on aurait pu croire qu'ils auraient eu l'intelligence de se débarrasser. Jetez vos capes les mecs, vous avez plus l'age, y'a un moment où il faut grandir un peu. Dommage Sunn O)))))))))))))))))))))).Emilien.ps : je n'ai pas fait un seul copier/coller pour écrire l'insupportable nom du groupe. J'ai plus utilisé la touche ")" de mon clavier que jamais BON SANG.