Les libéraux et l’enseignement (1815-1830) : un rendez-vous manqué

Publié le 20 juillet 2009 par Soseducation

Par Yves Morel, docteur en histoire, titulaire d’un DEA de Sciences de l’éducation. L’auteur travaille à la délégation académique à la formation du rectorat de Lyon et est chargé de recherche à l’Institut de recherche indépendant pour l’éducation (IRIÉ).

Période haute en réflexion et en prises de position, les dix-huit années qui séparent le retour au pouvoir de Louis XVIII (1815) de l’adoption des lois Guizot sur l’enseignement (1833) vont marquer un tournant décisif dans l’histoire scolaire de la France. Autour de la question de l’école, de ses finalités et des moyens à lui attribuer, trois courants au moins vont se disputer : les libéraux, groupés autour des membres de la Société pour l’instruction élémentaire et des partisans de l’enseignement mutuel ; les conservateurs, groupés autour de Guizot ; les catholiques, groupés autour des légitimistes, des congrégations et du clergé resté fidèle à Rome. Les premiers attendent de l’instruction un progrès général et continu du genre humain, suivant l’idéal de Condorcet. Les seconds, lui assignent pour but principal d’« assurer la salubrité, l’ordre public et le repos de l’avenir ». Les troisièmes, de préserver les droits de la Révélation et la transmission des vérités de la foi en même temps que de la raison et des mœurs. Pour les libéraux, l’État doit assurer reconnaissance juridique, collaboration, soutien logistique et financier, mais sans s’annexer la gestion des établissements d’enseignement, décider de leurs programmes et de leurs méthodes, ou piloter le recrutement de leurs maîtres. Pour les conservateurs au contraire, l’État doit assurer le contrôle et la direction du système éducatif. Pour les légitimistes, l’État peut être utile à l’institution scolaire s’il respecte les droits de l’Église et honore les vérités supérieures de la Révélation. La victoire finale de Guizot ne saurait effacer l’importance de cet affrontement et les enjeux de ces discussions enflammées. Pour une large part, elle explique la forme prise ultérieurement par l’institution scolaire française en même temps que le rapport si singulier que les Français nourrissent depuis lors avec l’école.

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