Voici une décision qui ordonne la pause d'un coupeur de circuit et des dommages intérêts dans le cas de telles nuisances
:
"Sur le pourvoi formé par l'association Hygiène naturelle, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 mars 1998 par la cour d'appel de Colmar (2e chambre civile, section B), au profit :
1 / de M. Jean-Michel X..., demeurant ...,
2 / de M. Jean-Claude Z..., demeurant ...,
3 / de Mme Colette A..., demeurant ...,
4 / de l'association "Quartiers tranquilles" (AQUAT), dont le siège est ...,
défendeurs à la cassation .
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 9 mars 2000, où étaient présents : M. Guerder, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. de Givry, conseiller rapporteur, MM. Pierre, Dorly, Mme Claude Gautier, M. Mazars, conseillers, M. Trassoudaine, conseiller référendaire, M. Chemithe, avocat général, Mme Claude Gautier, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. de Givry, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de l'association Hygiène naturelle, de Me Garaud, avocat de MM. X..., Z..., de Mme A... et de l'association "Quartiers tranquilles", les conclusions de M. Chemithe, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 6 mars 1998), que MM. X..., Z... et Y... A..., se plaignant des nuisances sonores occasionnées par les manifestations champêtres de l'association Hygiène naturelle, ont assigné celle-ci en cessation des troubles excessifs de voisinage et réparation de leur préjudice ; que l'association Quartiers tranquilles (AQUAT) est intervenue à l'instance ;
Attendu que l'association Hygiène naturelle fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à procéder à
l'installation, sur l'ensemble de ses équipements sonores et en permanence, d'un coupeur de circuit de manière que le niveau de réception dans la propriété des consorts X..., Z... et A..., ne
soit pas supérieur à 51,5 dba, sous astreinte, et d'avoir alloué aux demandeurs et à l'AQUAT des indemnités alors, selon le moyen,
1 / qu'en relevant d'office que l'organisation de concerts de plein air ne relevait pas de l'objet social de l'association Hygiène naturelle, fait qui n'avait été invoqué nulle part et qui
n'entrait pas dans le débat, la cour d'appel a violé les articles 7 et 16 du nouveau Code de procédure civile ; 2 / que la responsabilité encourue du fait de la production de troubles anormaux de
voisinage est une responsabilité pour faute ; qu'aucune faute ne se trouve caractérisée lorsque le fauteur de troubles allégués, premier installé sur les lieux, s'est vu peu à peu encerclé par
des propriétaires venus s'agglutiner autour de lui, nonobstant ses activités de loisirs et de nature, de renommée locale ;
qu'en refusant de prendre en considération dans son appréciation la circonstance que la société Hygiène naturelle s'était installée en 1901, dans un site naturel désert, à l'état de vignobles, et peu à peu urbanisé, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 3 / que la responsabilité encourue du fait de de la production de troubles "anormaux "de voisinage suppose établie et dûment caractérisée "l'anormalité" des nuisances attribuées à l'activité incriminée ; que même établie, l'infraction à une réglementation administrative ne permet pas à elle seule de retenir l'existence de troubles anormaux de voisinage ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, se fondant sur les mesures sonores prise par l'APAVE, ponctuellement et pour les besoins de la cause, a seulement affirmé que le bruit produit, même inférieur aux autorisations administratives délivrées par la commune, "excédait les limites admises par les textes " ; qu'en l'état de cette affirmation dénuée de toute référence utile et en elle-même impropre à caractériser l'anormalité des troubles occasionnés, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 4 / que sans donner aucune précision sur les mesures prises et l'intensité des troubles sonores allégués, la cour d'appel s'en est référée en réalité à tous autres faits sans lien direct avec les problèmes d'isolation phonique du kiosque à musique, déterminants des mesures sollicitées et ordonnées ; que, de ce point de vue encore, l'arrêt attaqué est dépourvu de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; 5 / qu'en se bornant à relever que l'organisation durant la période estivale d'une huitaine d'après-midi musicales, en plein air le dimanche, "réduisait l'agrément" de pavillons et jardins environnants, sans caractériser davantage l'anormalité des troubles occasionnés, la cour d'appel a privé derechef sa décision de toute base légale au regard du texte susvisé ;
Mais attendu qu'aprés avoir relevé l'aggravation des conditions d'exploitation de l'association du fait de la
transformation de l'ancien kiosque à musique, le déroulement régulier sur une période de 5 mois de manifestations bruyantes le dimanche, parfois nocturnes, dépassant d'une valeur de 6 à 7
décibels l'émergence admise par le décret du 5 mai 1988 alors en vigueur, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve que la cour d'appel, qui n'avait pas
à caractériser une faute, en a déduit, sans méconnaître les termes du litige, que les manifestations excédaient par leur durée, leur répétition et leur intensité, les inconvénients normaux de
voisinage ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association Hygiène naturelle aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne l'association Hygiène naturelle à payer à MM. X..., Z..., Y... A... et à l'association "Quartiers tranquilles" la somme globale de 10 000 francs."