"Quand je pense à Queen, toute ma vie me revient…"
Cette phrase, qui apparaît à deux reprises dans ce premier roman graphique de Mike Dawson, résume assez
justement le point d’équilibre où celui-ci se situe. Entre autobiographie et œuvre de fan, cette riche bande dessinée tout juste parue chez Rackham imbrique un récit intime (de l’enfance à l’âge
adulte) à une passion jamais démentie pour le groupe Queen. Et tandis que le jeune Mike passe de l’enfance à l’adolescence, que sa famille déménage de l’Angleterre aux États-Unis, ce sont plein
de petits détails qui viennent pointer la sincérité de sa passion pour un groupe que l’on réduit bien trop souvent à quelques tubes et à l'outrance de son leader. Cette cassette de A Night at
the Opera que lui donne son père, sa rivalité avec sa petite sœur au sujet de Wham !, son groupe préféré à elle, cette BD qu’il crayonne basée sur les paroles de Bohemian Rhapsody,
la découverte du clip de I Want to Break Free, et surtout ces quelques jours fulgurants où il fut annoncé que Freddie Mercury était séropositif, puis, soudain, qu’il était décédé.
Comment les chansons rythment nos vies, comment certaines nous reviennent en mémoire à l’occasion de tel ou tel événement, c’est de cela que parle Freddie et moi de façon assez
touchante.
Ce qui frappe aussi dans la BD de Mike Dawson, c’est qu’elle ne s’adresse pas spécialement au plus grand
nombre, que les chansons citées ne sont pas forcément les plus connues (voir l'anecdote sur Stone Cold Crazy, passé à une boum et qui fut ce bide musical vidant la piste de danse que
beaucoup d'entre nous connurent). Dawson a 34 ans. Son album préféré de Queen est le deuxième, signe d’un bon goût manifeste. On le suit moins quand il s’enthousiasme pour certains morceaux de
Hot Space (Las Palabras de Amor, sa chanson préférée suite à sa première rupture amoureuse), pour George Michael ou pour la comédie musicale We Will Rock You.
Mais du concert Tribute de Wembley que je vécus en direct et en intégralité dans les locaux de je ne sais plus quelle radio aux premiers pas en solo de Brian May (que je vis deux fois en concert
à l'Elysée Montmartre, avec Cozzy Powell à la batterie, tandis que le pauvre Mike, lui, ne réussit même pas à décrocher une place lorsqu'il passait près de chez lui), il y a bien des évocations
ici qui sont comme autant de raisons pour lesquelles ce Freddie et moi m'a tant plu. Par chance, cette œuvre, qui n'est pas par moments sans évoquer celles d'Alex Robinson, fut achevée
avant que Queen ne sorte enfin un nouvel album (pitoyable) l’an dernier avec Paul Rodgers (mais sans le bassiste John Deacon). On aimerait savoir ce qu'en a pensé Mike Dawson, lui qui, comme moi,
assista quand même à un concert de la "reformation" de 2005 plutôt circonspect (réduisant même Paul Rodgers au "mec qui chantait All Right Now"…).
On aimerait aussi savoir s’il a fini par rencontrer Brian May, comme il l’imagine dans une des ultimes planches du livre…