L’étape d’hier a été véritablement sabotée par une majorité d’équipes (14 sur 20) et laisse un goût amer dans la bouche de tous les amoureux de la petite reine.
Les coureurs on fait un simulacre de course pour protester contre l’interdiction d’utilisation d’oreillettes sur l’étape Limoges-Issoudun.
Ce qui est encore plus insupportable c’est que cet essai avait été annoncé par l’Union Cycliste internationale (UCI) bien avant le Tour (mi-juin) et les équipes étaient au courant depuis maintenant plus d’un mois !
Alors faire ça au Tour un 14 juillet, c’est vraiment médiocre et il faut espérer que la direction du Tour de France saura s’en souvenir l’année prochaine lors de la sélection des équipes.
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Un enjeu politique ?
Bien sûr ! Il y a derrière tout ça comme une manœuvre politique de certains managers qui rêvent encore de cette ligue fermée des meilleures équipes, avec accès garanti aux meilleures courses sans contreparties ni sportives (pas de système de montée-descente) ni éthiques, rêve porté à l’époque par le pathétique Manolo Saiz et qui s’est depuis fracassé sur l’affaire Puerto (l’espagnol a été attrapé par la police avec un sac de sport plein de billets pour le médecin-dopeur Fuentes).
D’ailleurs, Marc Madiot n’a pas hésité à qualifier ce qui s’est passé hier de “Manigances de bricolos“.
Quel est le problème ?
Résultat, un directeur sportif va « en direct » renseigner ses coureurs sur n’importe quel aspect de la course : qui descend chercher les bidons, qui fait pipi sur le bord de la route, quelle allure a l’échappé… On ne demande alors plus au coureur de regarder la course, de la « sentir » mais bien de fermer sa gueule et de pédaler aux ordres du caporal-chef confortablement assis dans sa voiture; en d’autres termes, il ne réfléchit plus. Or en vélo, il faut regarder ses adversaires, les tester, optimiser le parcours au regard de ses ressources… C’est-à-dire réfléchir !
Mais derrière les arguments de sécurité avancés par les directeurs sportifs (prévenir leurs coureurs ???) il y a un autre enjeu, celui du rôle du directeur sportif et ce, à deux niveaux : dans la course, pour les aspects tactiques, et dans le cyclisme, pour le business et les sponsors, comme en témoigne cette récente interview (assez hallucinante) de Vincent Lavenu, quand il dit « Le Tour est tellement important pour les équipes. Je gère des millions d’euros de budget. On ne peut pas laisser autant d’aléas dans la course. » Le mot est lâché, « aléa ». Les directeurs sportifs ne veulent pas l’aléa de course, ça ne rentre pas dans une stratégie commerciale, dans un business plan, or le Tour est leur fond de commerce et il faut montrer le maillot, donc maîtriser au mieux les paramètres, idéalement selon 2-3 scénario qu’on connaît tous et que l’on a pu constater hier par exemple entre Limoges et Issoudun. Or refuser l’aléa, n’est-ce pas nier l’essence même du sport cycliste ?
Alors voilà, aujourd’hui le peloton c’est un peu comme Cycling manager : des directeurs sportifs qui regardent la télé dans leur voiture et qui disent à leurs coureurs : « accélère, freine, va pisser, mange, regarde derrière ! ». C’est consternant et le pire, c’est que les coureurs ne bronchent pas…
Pourtant, il suffit de lire ces quelques lignes de Greg Lemond pour tout comprendre et constater l’évidence : il faut supprimer les oreillettes qui n’apportent rien, cela responsabilisera le coureur et les parcours d’étapes, variés, redeviendront un magnifique terrain de jeu propice au suspens, aux surprises…
Espérons maintenant que la direction du Tour de France tiendra bon pour la deuxième étape sans oreillettes (Vittel-Colmar) car c’est une bonne décision.
François