Nous devrions avoir de vrais débats autour de chaque action importante du gouvernement. Des débats dans la classe politique et donc au gouvernement, bien sûr. Mais aussi des débats dans la population, dans les bars, les diners de famille, et sur le web. On trouve des partisans farouches de la politique du gouvernement et des adversaires acharnés. Mais ça donne un débat qui est fondé sur des positions de principe et des avis qui sont souvent excessifs n'est pas un vrai débat. Un vrai débat, c'est un débat qui est alimenté par les partis politiques, un débat qui a plusieurs semaines pour s'exprimer et pour permettre de se forger une opinion, voire même plusieurs mois.
Je vois plusieurs raisons à ce phénomène :
- L'état dans lequel se trouve le PS, bien sûr. On attend beaucoup de ce parti. Il doit participer activement à ce débat que je souhaite, mais pour cela il doit avoir une certaine unité. Aujourd'hui on assiste à des initiatives comme dernièrement celle de Fabius à l'assemblée (suivi par les députés) et celle de Hollande. Mais Hollande a travaillé seul et la motion de censure de Fabius est arrivée à contre-temps. Le PS a besoin de se reconstruire, et a priori je pense que Aubry fait un bon boulot dans ce sens. Le problème est que ça prendra du temps.
- La personnalité de Nicolas Sarkozy. Il ne proclame pas "tous ceux qui ne sont pas avec moi sont contre moi" mais son attitude volontaire, pour ne pas dire provocatrice par moments, fait que la zone grise qui se situe entre ses partisans et ses adversaires est assez réduite. Résultat, ses partisans passent pour des groupies et ses adversaires pour des opposants féroces sans crédibilité.
- Le mode de réforme du gouvernement. En menant plusieurs réformes en même temps (stratégie que j'approuve) et avec le story telling dans lequel les médias français se laissent entraîner, le gouvernement a profondément modifié le rythme médiatique. Or, ce rythme médiatique est essentiel aux débats. Et comme chaque semaine un sujet chasse l'autre, les débats n'ont pas le temps de prendre la place qu'il leur faut.
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L'ouverture, concrétisée par l'arrivée de personnalités de gauche et du centre au gouvernement, et le changement
de politique depuis la crise économique (on est passés en gros d'une politique libérale à une politique keynésienne) ont participé à l'assèchement de la gauche en idées alternatives. La
droite occupant son créneau keynésien avec un Etat interventionniste, la gauche voit l'herbe coupée sous ses pieds.