Le conte de la pérégrination de mon homme rêvé en rêve.
Il répand les sels sur les menus crânes jolis,
orbites béantes et bouches demi-offertes, ondulantes carcasses de cartilages,
jadis affamées.
Ce sont les salaisons rituelles.
Sur l'étal sablonneux et blond, incrusté de bestioles arrachées au large,
l'homme met le pied sur l'échine d'un espadon.
Au ciel, un vol d'hirondelles, parfaits faux-charognards, se déverse.
Il marche et laisse ses traces de pieds de géants,
soufflant un peu avec l'aval du vent.
Quant à moi, je baiserai le pays avec cérémonie, le rendrai tout petit et tout connu: villages lumineux, visages illuminés.
Quelques passages à sec, quelques croisées de chemins ornées de Sacré-Coeur.
Je glisserai à travers les champs de courbes,
Je passerai en flic-flocquant dans les mares de canards gluants,
À pas de danse sous les saules, en tournant, m'habillant d'écorces.
Sur la plage, immense comme un pays en entier,
presque une offrande de l'onde,
enfin arrivé, je mettrai le pied sur le poisson oublié.
Je le prendrai et le déposerai dans ma poche.
Je crois que je vais parler.
Je lui dirai.
- Donne-moi ta bouche délicatement dentée,
- Tes lèvres délirantes qui me portent comme la marée.
- Donne-moi le trésor dissimulé très loin,
tout au coeur des anneaux circulaires de ton coeur-coquille.