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La grande mascarade de l'Iran

Publié le 04 juillet 2009 par Achigan
La grande mascarade de l'Iran
Témoignage d'un Iranien sur la désormais célèbre mystification du vote qui a réélu frauduleusement Ahmadinejad.
Mascarades, jeu de marionnettes.
Tout ça, ça sonne comme avant la révolution française.
Or, le poing de la répression s'est musclé à travers les siècles,
hérissé par le tranchant des Mollahs.
Silence le jour "Allah Akbar" la nuit
23 Khordad (13 juin)
Deux heures après la fermeture des bureaux de vote, dix millions de bulletins avaient été comptés et Mahmoud Ahmadinejad avait obtenu 63% des voix. À l'aube, trente millions de voix avaient été comptées et Ahmadinejad obtenait toujours 63% des suffrages. C'est à croire que les gens qui comptent ne connaissent que le chiffre de 63%.
24 Khordad (14 juin)
Pour célébrer sa victoire, Ahmadinejad se rend à un rassemblement de 10 000 personnes. Il qualifie les contestataires de "poussières".
25 Khordad (15 juin)
Environ 3 millions et demi de "poussières" défilent en faisant le signe du V de la victoire [symbole de Moussavi] sur la place Azadi. La nuit, les iraniens montent sur leur toit et crient "Allah abkar". Je demande à mon ami Saviosh: sommes-nous en février 1979 ou en juin 2009 ? [Pendant la révolution de 1979, l'ayatollah Khomeyni appelait les Iraniens à monter sur leur toit et à crier "Allah abkar".] Il me dit: "Nous sommes en août 1953" [le coup d'État contre le leader nationaliste Mossadegh].
26 Khordad (16 juin)
Les amis d'Ahmadinejad se rassemblent sur la place Vali Asr. Pendant ce temps, quelques milliers de poussières se rendent sur la place Vanak. Avec quelques amis, nous allons voir les forces de l'ordre avec des fleurs pour leur fusils. Je dis à mon ami: "Les informations diront ce soir que nous avons mis le feu à la ville avec des fleurs!"
27 Khordad (17 juin)
Un million et demi de personnes se rassemblent en silence entre la place Haft-e Tir et la place Enghelab. Les informations disent: "Les perturbateurs silencieux n'ont pas laissé les gens circuler et travailler." La nuit, on entend "Allah abkar" partout. Je pense que la télévision affirmera: "Les perturbateurs, en coalition avec le monde occidental, empêchent les gens de dormir." Le gouvernement a coupé les SMS, les portables, Internet et les satellites. J'ai dit à mon ami: "Vérifie qu'ils n'ont pas débranché ton cerveau aussi."
28 Khordad (18 juin)
Les gens se retrouvent sur la place Toupkhaneh. Mir Hossein [Moussavi] est là aussi. Les amis continuent à chercher leur vote [allusion au slogan des manifestants "Où est passé mon vote ?"].
29 Khordad (19 juin)
Le vendredi est calme, le guide suprême a parlé. La nuit, les "Allah akbar" résonnent.
30 Khordad (20 juin)
Avec Siavosh, nous voulons contester de façon civile. Les pasdarans, les bassidjis, les forces de l'ordre et la police antiémeute sont tous venus pour que nous passions cette journée ensemble dans la joie. Quelle amitié ! La pluie de bâtons, le nuage de gaz lacrymogènes, l'orage des bottes !
31 Khordad (21 juin)
On ne peut plus manifester civilement. Cette nuit, je monterai sur le toit pour crier "Allah akbar".

Courrier International No 973, du 25 juin au 1er juillet 2009, p. 15.
Fortement théâtral comme témoignage et comme thématique.
L'affliction du jour, c'est la supercherie.
La Palestine, l'Iran, l'Irak, la Chine, tous avec leurs enjeux personnels sont devenus des maîtres du déguisement, de la manipulation des masses, de la terreur qui fait taire.
C'est un problème qui me choque et qui me fait sentir si impuissant.
La désillusion des peuples, c'est la mort de la démocratie.

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