En cette année de crise économique, la presse est en
danger. Mais si elle l’est, la démocratie aussi. Victor Hugo le rappelait à la tribune de l’Assemblée Nationale le 11 septembre 1948 : « ..
le principe de la liberté de la presse n’est pas moins essentiel, n’est pas moins sacré que le principe du suffrage universel. Ce sont les deux côtés d’un même fait. Ces deux principes
s’appellent et se complètent réciproquement. La liberté à côté du suffrage universel, c’est la pensée de tous éclairant le gouvernement de tous. Attenter à l'une c’est attenter à
l’autre ».
Pierre Regnault
Les difficultés de la presse écrite se révèlent encore plus en ces temps de crise. Le malaise est grand en France à cause du pouvoir sarkozyste qui a décidé de museler les médias. La télé, l’AFP, le CSA, certaines radios, plusieurs hebdos existent de moins en moins en tant que pouvoir indépendant. Les médias d’opinion sont en grande difficulté financière, comme Libération maintenu la tête hors de l’eau par … un Rotchild ( !)
Pour s‘en convaincre il faut lire la presse étrangère et ce qu’elle dit sur notre président. A tel point que, au moment où le nouvel Obs se rend, en catimini, toute honte bue, chez Sarkozy, Marianne se demande « s’il existe encore une presse d’opposition » en France ?
Les assises de la presse ont été un bide de belle ampleur mais n’ont, étrangement, pas été médiatisées par une presse tétanisée de déplaire, et très alléchée par les encarts publicitaires promis par le gouvernement. Il est « remarquable », « étonnant » que dans une période de « vaches maigres », le pouvoir finance de plus en plus de pages pour promouvoir sa politique.
Mais le malaise n’est pas seulement hexagonal. Un excellent numéro de courrier international du 18 juin 2009 montre à quel point dans l’occident tout entier la presse écrite va mal; la diffusion baisse (sauf en Chine et en Inde), les recettes publicitaires diminuent, elle est bousculée par le net, sans que celui-ci ne soit encore rentable. Il n’y a pas encore de modèle économique dans ce domaine. Seul un titre émerge aux USA : « Politico » qui semble exceller à combiner web et papier et fait trembler sur leurs bases le « Washington Post » et le « New York Times» !
Beaucoup de correspondants locaux dans toute la France ne sont pas des professionnels du journalisme,
oublient de vérifier les faits et estiment pourtant être de « vrais pro ». On assiste à des dérives courantes. Soit, selon les orientations de leur rédaction, ils se couchent devant
les pouvoirs en place pour les ménager et quémander leur publicité. Soit, ils donnent dans le
Bref, sous la pression du résultat, ils oublient simplement que ces pratiques ne relèvent pas de l’éthique journalistique. Critiquer au sens noble du terme fait partie du journalisme, mais
pas sans vérifier les faits. Ils doivent relire la charte du journalisme et comme le dit très bien Edwy Plenel :
Pour un journaliste «sa première obligation est à l’égard de la vérité, sa première loyauté envers les citoyens, sa première discipline la vérification et son premier devoir l’indépendance ».
Les difficultés des médias, les dérives de plus en plus fréquentes font réagir certains pouvoirs locaux
s’estimant mis en cause. Lors de l’Assemblée Générale récente de la fédération des maires des villes moyennes, j’ai pu constater à quel point de nombreux maires vivaient mal cette réalité là,
allant parfois jusqu’à multiplier les outils médiatiques institutionnels pour contrer la presse locale qui ne « parle que de ce qui va
mal ».
Une tendance est de voir des collectivités financer des médias locaux, institutionnels ou sous influence, et dans les faits, peser économiquement
contre la presse indépendante et aggraver encore plus sa situation, oubliant qu’à terme c’est la démocratie elle-même qui est menacée !
En Vendée, le conseil général va dans ce sens, instituant un journal publié tous les 15 jours, dont le moins que l’on puisse dire est que, techniquement bien fait, il n’est pas fidèle à la réalité, ce qui m’a conduit, y compris en séance publique à le dénommer « Vendée mensonge ».
Le monde change. Nous devons tous en tenir compte. La révolution de l’internet a fait tomber de son piédestal le journaliste qui prétendait avoir le monopole de l’opinion. « C’est sans doute une bonne nouvelle car le voici remis à sa place, sa juste place, sa raison d’être : chercher, trouver, révéler, trier, hiérarchiser, transmettre les informations, les faits et les réalités, utiles à la compréhension du monde, à la réflexion qu’elle suscite et à la discussion qu’elle appelle »
Je conclurai ce papier en laissant la parole à Albert Camus qui, au lendemain de la guerre, quand brillait l’espoir de refonder la République par un surcroît de démocratie, il écrivait, dans Combat le 31 août 1944, "notre désir d’autant plus profond qu’il était souvent muet, était de libérer les journaux de l’argent et de leur donner un ton et une vérité qui mettent le public à la hauteur de ce qu‘il a de meilleur en lui. Nous pensions alors qu’un pays vaut souvent ce que vaut sa presse. Et s’il est vrai que les journaux sont la voix d’une nation, nous étions décidés, à notre place et pour notre faible part, à élever ce pays en élevant son langage ».
Quelques adresses net – non exhaustives - pour compléter votre réflexion sur la question des médias et en particulier des nouveaux médias : véritables journaux gratuits ou payants, simples blogs, impertinents ou simplement différents, etc. et leur positionnement :
www.Rue89.com ; www.lepost.fr ; www.agoravox.fr www.mediaprt.fr ;
www.bakchich.info ;
www.marianne2.fr ; www.courrierinternational.com
www.tnova.fr/; http://www.fondation-copernic.org/ ; http://jegpol.blogspot.com/
www.actuchomage.org/ www.intox2007.info/ www.terra-economica.info/