L’Europe solidaire du peuple birman : "Se libérer de la peur "
Publié le 01 octobre 2007 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com
SELECTION RELATIO SUR TELERAMA Comment être solidaire du peuple birman, baillonné, bafoué, torturé par la junte militaire qui s’est accaparé le pouvoir depuis 1988 ? Sûrement pas en passant des vacances sur cette terre d’une splendeur vénéneuse, dont Orwell disait déjà qu’elle « recèle autant de beauté que de cruauté ». Depuis sa résidence surveillée à Rangoun, la chef de file de l’opposition Aung San Suu Kyi ne cesse de le répéter : toute escapade touristique fait le jeu de la dictature. Publiée dans le remarquable ouvrage collectif Birmanie, la peur est une habitude, la bande dessinée de Markus Huber et Frédéric Debomy le confirme : des bobos en chemises hawaïennes se repaissent du calme de ce pays, pendant que la femme de chambre de leur hôtel se fait piétiner par les soldats, sitôt son travail terminé... D’une grande rigueur journalistique doublée d’une qualité artistique exceptionnelle, ce livre alterne témoignages intenses (d’humanitaires, de soldats, de travailleurs forcés) et croquis glaçants sur l’un des pays les plus liberticides de la planète. Avec un but noble, engagé, parfaitement atteint : « Ne pas représenter la douleur de l’Autre (tâche risquée), mais représenter ce que nous comprenons de cette douleur. » ◆ M.Ln. Birmanie, la peur est une habitude (éd. Carabas) La Birmanie en romans Deux romans, paraissant en cette rentrée de septembre, confirment que la fiction est aussi un moyen d'approcher la réalité politique et sociale birmane. Dans La Cage au Lézards, la romancière canadienne anglophone Karen Connelly raconte l'oppression quotidienne à laquelle est soumise la population de ce pays — « Nous n'oublierons pas qu'ils ont construit une cage autour de nos vies », dit l'un des acteurs du livre — et l'enfer des prisons dans lesquelles la junte au pouvoir enferme ses opposants. Et dans Birmane, le journaliste et romancier français Christophe Ono-dit-Bio explore le pays, ses paysages, ses atmosphères, ses frustrations et ses espoirs, par l'entremise du personnage de César, journaliste et aventurier. ◆ Na.C. La Cage au Lézards (éd. Buchel-Chastel, 25 €), Birmane (éd. Plon, 21 €) La voix du défi « Du fait de leur nature même, les dictatures s'interdisent d'apprendre la vérité, car les gens qui vivent sous ces régimes prennent l'habitude de la cacher, à eux et entre eux. Certains vont même jusqu'à perdre l'habitude de voir la vérité. Ils voient seulement ce qu'ils pensent que leurs supérieurs veulent qu'ils voient. Ils finissent par ne pas oser entendre que qu'ils ne veulent pas entendre. Et à long terme, cela émousse l'intelligence. » ◆ M.Ln. Aung San Suu Kyi, La voix du défi, Ed. Stock Se libérer de la peur Paroles à méditer d’Aung San Suu Kyi, grande figure de la résistance birmane, prix Nobel de la Paix : « Ce n’est pas le pouvoir qui corrompt, mais la peur : la peur de perdre le pouvoir pour ceux qui l’exercent, et la peur des matraques pour ceux que le pouvoir opprime… Dans sa forme la plus insidieuse, la peur prend le masque du bon sens, voire de la sagesse, en condamnant comme insensés, imprudents, inefficaces ou inutiles les petits gestes quotidiens de courage qui aident à préserver respect de soi et dignité humaine. (...) Dans un système qui dénie l’existence des droits humains fondamentaux, la peur tend à faire partie de l’ordre des choses. Mais aucune machinerie d’État, fût-elle la plus écrasante, ne peut empêcher le courage de resurgir encore et toujours, car la peur n’est pas l’élément naturel de l’homme civilisé. » ◆ M.Ln. Se libérer de la peur, éd. des Femmes.