C'est une sacrée surprise que me fait Jean-Jacques lorsqu'il m'emmène au Château de Sassetot. Je ne m'attendais pas à un pareil cadre pour notre soirée. Ce château du XVIIIème a eu l'honneur d'accueillir l'impératrice Sissi durant un été entier : un médecin avait conseillé les bains de mer pour sa fille un peu faiblarde. Il avait donc fallu trouver un lieu de villégiature digne de son Altesse. Ce château fut donc réquisitionné.
Nous n'aurons pas le droit de manger en contemplant le grand portrait de Sissi puisque nous bénéficions d'un salon privé. Il faut dire que nous détonnerions un peu au milieu de la salle avec nos 12 bouteilles, nos crachoirs et les commentaires à voix-haute sur les vins dégustés.
Jean-Jacques a convié pour ce repas ses plus fidèles clients. J'en avais rencontré certains lors de leur venue à Tirecul en mai dernier. J'en découvre d'autres qui me connaissent pourtant déjà bien à travers mon blog. Je suis accueilli par le directeur de l'établissement, Jean-Philippe Renaudat, qui lui aussi apprécie mes écrits. J'apprends alors que je serai logé cette nuit au château. Chic !
Commence le long débouchage des bouteilles, puis leur dégustation afin de savoir si on les carafe ou non. Nous nous apercevons qu'il y a beaucoup plus de vins à carafer que de carafe. Tant pis, on fera avec (ou plutôt sans).
Le chef nous a préparé toute une série de mises en bouche. Le problème, c'est que la plupart appelle plutôt le vin blanc. Et qu'il y a une grande majorité de vins ... rouges ! Une pièce de boeuf suivra donc afin de pouvoir s'accorder avec une demi-douzaine de vins.
Côtes d'Auxerre 2006 "Biaumont" du domaine Goisot : un nez sur les agrumes, la pierre et le buis. Une bouche ronde, fraîche, à l'acidité présente mais bien intégrée, et une finale tonique, dotée d'une astringence évoquant le pamplemousse.
Une brouillade de saumon nous est servie en même temps. Mais l'accord fonctionne logiquement beaucoup moins bien. Ceci dit, aucun vin n'est vraiment satisfaisant avec les oeufs brouillés.
Le tartare de bar convient lui aussi très bien au vin des Goisot. Je dirais même la chair du poisson apporte une profondeur supplémentaire au bourgogne, stimulé par la compétition.
L'acco
Il n'y a effectivement pas grand chose à dire de cette roussette de Magnin. C'est assez fluide, manquant de corps et de personnalité, une finale courte. Pas emballant, quoi.
Nous finissons la série des mises en bouche sans boire de vin, car elles s'avèrent peu propices au mariage.
Emulsion de mangue & jambon
Tartare de légumes crus
La pièce de boeuf, purée de patates douces nous est servie. Elle permet d'accompagner les vins qui suivent...
Premières Côtes de
Château Figeac 1983 (Saint Emilion) : nez sur l'humus, le café, le tabac et les épices. Bouche plus ample et plus dense que le précédent. Mais aussi plus dure et moins fine. Il est peu de dire que les tannins ne sont pas d'une grande délicatesse. La fin est asséchante.
Il restait deux mises en bouche que nous avions mise de côté pour accompagner le dernier vin. L'une à base de roquefort, l'autre à base de mangue. En effet, il reste à boire le Vent d'Autan 1989 de Robert Plageoles (100% Ondenc). Sa robe est entre l'or et le cuivre. Le nez est d'une grande complexité : coing, figue, pomme confite. La bouche est douce et fraîche, avec une intensité aromatique impressionnante. A l'ouverture, le vin était beaucoup plus suave. Il est maintenant beaucoup plus réservé, presque austère. Il n'empêche que la finale est un véritable hymne au coing, avec une belle persistance.
Le vrai dessert arrive : sans trop me tromper, ça doit être un millefeuille aux fraises. Ceux qui avaient encore du Vin d'Autan ont pu le finir sur celui-ci. Les autres ont fini à l'eau fraîche. Si le repas était fini, les conversations se sont prolongées.
Si l'on voulait conclure, on pourrait dire que pas mal de vins n'étaient pas dans leur meilleure phase, mais ce n'est au final pas très important. Ce qui comptait, c'était la qualité des échanges, et j'ai l'impression que ce fut à ce niveau une grande réussite. Il est toujours étonnant de voir comment des personnes qui ne se connaissaient pas quelques heures auparavant réussissent à communiquer en parfaite harmonie, comme s'ils s'ils étaient des amis depuis toujours.
Après le départ de la plupart des invités, Jean-Philippe m'a fait découvrir la Bénédictine que j'évoquais hier. C'est intéressant au niveau aromatique, mais beaucoup trop sucré à mon goût. Puis avec Jean-Jacques et Jean-Philippe, nous avons devisé une heure encore autour d'une bouteille de Chitry d'Olivier Morin. Pas vraiment raisonnable, puis qu'il était près de 3 heures du matin lorsque nous nous sommes séparés.
J'ai alors rejoint la suite qui m'a été allouée. Je me suis endormi rapidement dans mon lit à baldaquin, rejoignant Sissi au pays des songes.
Ce fut de courte durée, car le jour a pénétré dans la chambre dès 6 heures du matin malgré les épais rideaux. J'ai encore somnolé une petite heure en plus, sans vraiment me rendormir. J'ai donc décidé de me lever et de commencer à travailler sur la suite de mon récit de vacances.
Après un très bon petit-déjeuner, j'ai pris quelques photos du château, et je suis reparti à Fécamp pour passer une seconde journée avec Jean-Jacques. Celle-ci fut plus consacrée à la discussion qu'aux visites. Aussi ne vous sera-t-elle pas relatée sur le blog.
Merci à Jean-Philippe et à Jean-Jacques
pour leur superbe accueil !
(à suivre...)
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