Tabagisme passif: pour l'OFSP tous les locaux sont fermés ou fermeront

Publié le 08 juillet 2009 par Francisrichard @francisrichard
Hier, c'est avec effarement que j'ai lu dans un article du Matin (ici) que les fonctionnaires de l'OFSP (l'Office fédéral de la santé publique) avaient une conception bien particulière de ce qu'est un local fermé.

L'internaute se souvient - ou devrait se souvenir - que la Loi sur la protection contre le tabagisme passif  [que l'on peut télécharger (
ici )], votée par le Parlement le 3 octobre 2008, avait prévu la possibilité d'établissements fumeurs (voir mon article Les Dissidents de Genève ont trois mois pour convaincre ) :

Art. 3 Etablissements fumeurs

Une autorisation d’établissement fumeurs est octroyée sur demande aux établissements

de restauration qui remplissent les conditions suivantes:

a. ils disposent d’une surface accessible au public égale ou inférieure à 80 m2 ;

b. ils disposent d’une ventilation adéquate et sont clairement reconnaissables

de l’extérieur comme des établissements fumeurs;

c. ils n’emploient que des personnes dont le contrat de travail stipule qu’ils

acceptent de travailler dans un établissement fumeurs.

Les établissements fumeurs, dont il s'agissait, dans l'esprit du législateur, étaient des locaux réellement fermés, puisqu'ils devaient être reconnaissables de l'extérieur comme des établissements fumeurs.

Une loi, pour être appliquée, doit faire l'objet d'une ordonnance. Si la loi est votée par les parlementaires, l'ordonnance est concoctée par des fonctionnaires, qui doivent en principe en respecter l'esprit. Avant que l'ordonnance ne soit applicable, encore faut-il qu'elle soit, à l'état de projet, auditée par un certain nombre d'organisations intéressées de près ou de loin à son objet.
Le 23 juin dernier la procédure d'audition du projet d'Ordonnance sur la protection contre le tabagisme passif a été ouverte par l'OFSP et une lettre (
ici) a été adressée aux gouvernements cantonaux, aux organisations faîtières des communes et des villes, aux organisations faîtières de l'économie, aux milieux intéressés (ici). Cette procédure se terminera le 4 septembre prochain.
L'article 2 de l'ordonnance (
ici) est libellé comme suit :

Interdiction de fumer et protection contre le tabagisme passif

1 Sous réserve des art. 3 à 6, il est interdit de fumer dans les espaces fermés:

a. qui ne sont pas uniquement accessibles à un groupe de personnes déterminé;

ou

b. qui servent de lieu de travail, à titre permanent ou temporaire, à plus d’une

personne.

2 Les espaces dont au moins la moitié de la surface du toit ou des parois latérales est

ouverte à l’air libre ne sont pas considérés comme fermés. Peu importe le matériau

dans lequel la cloison est fabriquée et le caractère permanent ou temporaire de celle-ci.


Le rapport (ici), qui accompagne le projet d'ordonnance, explique ce qu'il faut entendre par là  :


La notion d’« espaces fermés » a été interprétée de manière à prendre en considération la protection effective sur la santé. Un espace doit avoir une ouverture d’au moins la moitié du toit ou d’au moins la moitié des côtés pour ne plus être considéré comme fermé. En effet, dans les pièces où seule une paroi ou une petite partie du toit est ouverte, l’air chargé de fumée reste dans la pièce et ne circule pas suffisamment. Les personnes s’y trouvant sont donc presque autant exposées à la fumée que dans un espace complètement fermé. C’est pourquoi l’installation de grandes baies vitrées sur un seul côté de l’espace, de terrasses en grande partie fermées par des bâches ou les espaces longs et étroits avec deux petits côtés ouverts aux extrémités doivent, dans tous les cas, être considérés comme des espaces fermés. Les ouvertures doivent donner directement sur l’extérieur, c’est-à-dire à l’air libre. Dans le cas contraire, comme, par exemple, pour les terrasses de café des centres commerciaux, il s’agit toujours d’un espace fermé.

Le matériel de construction de l’espace fermé, qui peut d’ailleurs être permanent ou temporaire, n’a pas d’importance. Ainsi, des tentes dont les parois sont constituées de bâches sont, par exemple, à considérer comme des espaces fermés, même si elles sont installées pour un temps déterminé.


Dans le Matin d'hier (ici), le journaliste montrait qu'à cette aune-là les terrasses abritées du vent et du soleil et les tentes lors de fête ou de braderie seront considérées comme des locaux fermés, où il sera interdit de fumer. Comme il sera interdit de fumer dans des locaux fermés privés à partir du moment où plus d'une personne assurera le service...

Dans le Matin  d'aujourd'hui (
ici), le journaliste rapporte les réactions des élus à l'article de la veille :

Ah bon ? La loi permet ça ? [ Dominique de Buman (PDC/FR)]
Mais je n'ai jamais voté pour ça. [ Hugues Hitpold (PRD/GE)]
C'est intolérable. La loi était claire. L'administration n'a pas le droit d'aller plus loin. [ Hans Fehr (UDC/ZH)]
Les fonctionnaires font des lois plus ou moins rigoureuses selon leurs opinions. [ Laurent Favre (PRD/NE)]
On n'est pas sorti du cadre, on l'a carrément explosé ! Le but était de protéger les employés contre la fumée passive et on se retrouve à interdire la fumée active dans les mariages. C'est hallucinant. [Yves Niddeger (UDC/GE)]
Pour en arriver là, il aurait fallu avoir le courage d'interdire la cigarette. Mais nous ne l'avons pas fait. Cette loi est un compromis de compromis. Elle était donc très adoucie, mais les hygiénistes de l'OFSP en ont fait un chef-d'oeuvre de technocratie. [ Christophe Darbellay (PDC/VS)]

Les parlementaires auraient dû plutôt avoir le courage de ne pas faire de loi du tout. Car, comme le dit le professeur Philippe Even, le tabagisme passif n'a jamais tué personne ...

Francis Richard
Sur le tabagisme passif, voir notamment mes articles
Le Pr Molimard dit tout ce que vous devriez savoir sur le tabagisme et Le Pr Molimard apporte son soutien aux Dissidents de Genève
La photo provient d'ici