Le gouvernement Harper se prépare pour une autre importante ronde d'achats militaires. Selon les informations obtenues par Le Devoir, le ministre de la Défense, Peter MacKay, annoncera dès aujourd'hui l'acquisition de nouveaux véhicules de combat et de transport de troupes pour la Force terrestre. Plusieurs véhicules de la flotte actuelle seront également remis à niveau. La facture totale, étalée sur plusieurs années, frôlera les cinq milliards de dollars.
Plus tard cet été, le gouvernement annoncera aussi qu'il a finalement conclu, après trois ans de négociations, un contrat avec Boeing pour l'acquisition de 14 hélicoptères de transport Chinook. La commande initiale devait être de 16 appareils, mais il semble que l'achat ait été revu à la baisse récemment. Dans ce cas, la facture finale devrait approcher des 4,5 milliards de dollars, incluant l'entretien des hélicoptères pendant 20 ans.
Le ministre MacKay sera de passage cet après-midi à la base militaire de Gagetown, au Nouveau-Brunswick, et il en profitera pour annoncer un investissement massif dans les véhicules de l'armée de terre. Il s'agit d'argent frais qui n'a pas été annoncé précédemment.
Pour tenter de positionner favorablement son gouvernement à l'approche d'une possible campagne électorale à l'automne, le ministre MacKay fera notamment valoir que les achats militaires aideront à relancer l'économie canadienne, puisque les entreprises qui remportent les contrats doivent réinvestir au pays l'équivalent du montant obtenu.
De plus, une partie des annonces faites aujourd'hui touchent les véhicules blindés légers (VBL), qui sont construits et réparés dans le sud de l'Ontario, près de London, un endroit frappé durement par la récession. L'Ontario sera le prochain champ de bataille électoral.
L'armée de terre réclame depuis plusieurs mois la mise à niveau d'une partie de sa flotte de véhicules. La mission à Kandahar, avec ses conditions topographiques et climatiques extrêmes, mène la vie dure aux engins des Forces canadiennes. Sans compter les attentats des talibans et l'entraînement intensif des soldats au Canada avant le déploiement en Afghanistan. La Force terrestre estime que la moitié de sa flotte de véhicules est actuellement hors d'usage ou en attente de réparations.
Le ministère de la Défense annoncera donc aujourd'hui l'achat de nouveaux VBL et la remise à neuf de plusieurs autres. Cela devrait coûter près d'un milliard de dollars. Ces véhicules blindés, qui servent à la fois au transport des troupes et au combat, constituent l'épine dorsale de la Force terrestre, qui en possède près de 600. Plusieurs véhicules, achetés au milieu des années 90, sont toutefois au milieu de leur vie utile et exigent des réparations.
L'armée de terre annoncera aussi la mise à niveau de plusieurs M113, un véhicule à chenilles qui sert au transport des troupes. Les Forces canadiennes viennent tout juste de terminer la remise en état de quelque 280 véhicules de ce type, mis en service entre 1968 et 1991. Quelques dizaines de M113 supplémentaires seront remis en état. Ils serviront de véhicule de soutien logistique pour les VBL (aussi nommés LAVIII en anglais). Ce travail de remise à niveau pourrait être fait à Montréal.
Une nouvelle flotte de véhicules de combat
Les Forces canadiennes vont également annoncer l'achat d'une nouvelle flotte de véhicules de combat. L'armée recherche un petit char d'assaut qui peut aussi transporter des soldats. Un engin qui serait plus gros que le VBL (17 tonnes) mais plus petit que le Leopard 2 (64 tonnes), récemment acquis des Pays-Bas. Plus mobile qu'un gros char d'assaut, le nouveau véhicule servirait notamment à appuyer les Leopard 2 lors des opérations.
Deux entreprises étrangères sont favorites pour obtenir ce contrat. La britannique BAE Systems -- avec son CV90 (32 tonnes) à chenilles -- offre notamment de construire la tourelle et le canon (35 mm) au Canada. L'armée canadienne a récemment mis à l'essai un CV90 qui peut transporter sept soldats.
L'autre entreprise, Nexter, est française. Elle offre son VBCI (véhicule de combat d'infanterie), muni de chenilles et d'un canon de 25 mm. Il peut transporter huit soldats et pèse 26 tonnes. L'armée française vient tout juste d'en commander 115 exemplaires.
Ces annonces surviennent en plein coeur de l'été, alors que la Chambre des communes fait relâche. Les partis d'opposition ne peuvent donc pas interroger le gouvernement sur ses choix budgétaires. En 2006, lors de la dernière grosse vague d'annonces, le même procédé avait été utilisé.
14 hélicoptères Chinook
Selon nos informations, il en sera de même pour les hélicoptères Chinook, alors que l'annonce devrait avoir lieu avant la fin de l'été. Le gouvernement Harper avait annoncé en juin 2006 son intention d'acheter 16 hélicoptères de transport à l'entreprise américaine Boeing. Ottawa voulait toutefois un modèle spécial d'hélicoptère, plus polyvalent, capable de se rendre dans des zones de combat, de voler dans des conditions extrêmes et de faire du sauvetage. Les négociations avec Boeing se sont donc étirées pendant trois ans.
Il semble toutefois que le nombre d'appareils CH-47F ait été revu à la baisse, passant de 16 à 14. Le bureau du ministre MacKay a refusé de commenter cette information. En 2006, le gouvernement prévoyait dépenser environ 4,7 milliards de dollars, incluant l'entretien sur 20 ans, pour 16 hélicoptères. La nouvelle facture pourrait être légèrement moins élevée.
Ces hélicoptères neufs seront livrés à partir de 2012, alors que le Canada se sera retiré d'Afghanistan. L'automne dernier, le Canada a acheté six hélicoptères Chinook d'occasion à l'armée américaine pour les utiliser en Afghanistan dès cet hiver. S'ils sont en bon état à la fin de la mission, en juillet 2011, la flotte sera donc de 20 hélicoptères de transport d'ici quelques années.