C'était l'événement pour les publivores de tout poil, avec effet « madeleine de Proust » garanti. A la fin du mois de juin, le site de l'Institut national de l'audiovisuel (INA) mettait en consultation gratuite sur Internet pas moins de 200 000 spots publicitaires, de 1968 à aujourd'hui. Mais quatre jours après, problème : la société de production FAC Télévision affirme dans une lettre ouverte adressée au ministère de la Culture que l'INA, qui n'est pas propriétaire de ces films, n'a pas acquis les droits pour les diffuser.
« L'INA ne semble donc pas se soucier du droit légitime des auteurs, réalisateurs et compositeurs qui ont contribué à la réalisation des spots publicitaires, ni du droit de suite des acteurs qui ont pu y participer, ni enfin du droit des annonceurs de voir figurer ou non sur Internet, parfois dans une qualité plutôt incertaine, leurs produits et services marqués », indique la lettre.
« Juridiquement, les choses n'ont pas été complètement bordées », reconnaît l'institut
FAC Télévision - productrice de certains spots, créatrice du Petit Mineur annonçant les publicités au cinéma, mais qui réalise aujourd'hui des émissions de télévision et de webtélé - dénonce également un travail bâclé. Comme par exemple ce spot pour une eau gazeuse, loin de la mission pédagogique habituelle de l'INA. « Il n'y a pas de mise en contexte, pas de commentaire, des démarrages sont coupés, mal calés, estime Olivier Champeaux, directeur de FAC Télévision. Si l'INA considère que ces spots font partie du patrimoine audiovisuel, qu'il s'en occupe correctement. »
En fait, pour Olivier Champeaux, cette initiative aurait tout de l'opération marketing consistant à proposer un service séduisant en guise de produit d'appel pour les autres activités de l'INA. Pour l'heure, FAC Télévision ne demande ni retrait de spots ni compte en justice. Mais d'abord des explications (Voir la lettre qui a été postée dans le forum de notre premier article).
Deux garde-fous mis en place
Contacté par 01net., l'institut reconnaît effectivement ne pas avoir les droits sur ces films. Mais se dédouane. « Juridiquement, les choses n'ont pas été complètement bordées, explique le directeur juridique Jean-François Debarnot, mais elles ne pouvaient pas l'être. L'ancienneté du fonds ne nous permettait pas d'identifier tous les ayants droit. » Ceux-ci se répartissent entre les annonceurs, les acteurs, les sociétés de production, les auteurs des musiques et les interprètes. Ce dont l'INA admet très bien avoir eu conscience dès le début de son projet.
Du coup, dans l'éventualité de plaintes, il a mis en place deux dispositifs en guise de garde-fou. Dès la première contestation sur un spot précis, le film sera retiré, sans même que l'ayant droit n'ait à apporter de justification. Seconde approche, plus lourde, si un annonceur se retrouve poursuivi par un ayant droit (un compositeur, etc.) pour avoir laissé diffuser un spot sans autorisation, l'INA garantit qu'elle paiera tout : la condamnation, les frais de justice et d'avocat. « C'est une manière de limiter la casse », résume Jean-François Debarnot. Et de reconnaître que l'initiative de diffuser ces spots pose problème.
L'INA est actuellement en train de préparer une réponse à FAC Télévision. Mais souligne que la société de production est à l'origine de la seule protestation reçue au sujet de ces spots.
Une question :
En application d'HADOPI, le directeur de l'INA sera-t-il réellement condamné (avec inscription sur son casier judiciaire) à 6 mois de prison et 35000 € d'amendes par le Tribunal Correctionnel ?
A ne pas souhaiter car l'INA est une institution cela reviendrait à dire que l'Etat se condamne lui-même et fait payer ses concitoyens. UBU doit bouger dans son cerceuil.
Ci-dessous la lettre :
Bonjour, voici ci dessous la copie de la lettre ouverte adressée le 29 juin au Ministère de la Culture concernant l'activité de l'INA Nous vous remercions d'en prendre connaissance et de porter si possible notre demande.
LETTRE OUVERTE
A Monsieur Frédéric Mitterrand, Ministre de la Culture et de la Communication
Monsieur le Ministre,
25 juin 2009 : l'INA a ouvert au public depuis cette date la consultation par internet de 200 000 publicités via son site internet à l'adresse http://www.ina.fr/pub.
La gratuité n'est pas la justification pour faire tout et n'importe quoi sur le Réseau et, sous couvert de mission de service public, l'INA méconnaît certains des fondamentaux du Droit de la Propriété intellectuelle.
La récupération des fonds de la RFP, Socodip et Arpp n'emporte pas de fait le droit de reproduire et de représenter des images, scénarisées, avec illustrations musicales qui ont été uniquement confiées à ces différents organismes dans le cadre de campagnes publicitaires sur les réseaux spécifiques de diffusion par télévision avec des dates, horaires et fréquences de passages préétablies avec l'accord des annonceurs et/ou de leur agence de publicité.
L'INA ne semble donc pas se soucier du droit légitime des auteurs, réalisateurs, compositeurs qui ont contribué à la réalisation des spots publicitaires, ni du droit de suite des acteurs qui ont pu y participer, ni enfin du droit des annonceurs de voir figurer ou non sur internet, parfois dans une qualité plus qu'incertaine, leurs produits ou services marqués.
Avancer le sésame de la « mission de service public » permet à l'INA de se donner bonne conscience et de se justifier auprès du public.
Si la mise à disposition de 40 ans de mémoire publicitaire est louable dans le principe, ce n'est qu'à la condition que cette mise à disposition soit précédée de tous les préalables nécessaires d'autorisations, ce qui n'a pas été fait semble-t-il, et accompagnée par les citations complètes des sociétés de production, de réalisation, des annonceurs, etc....
Agir autrement serait purement et simplement bafouer le droit de la propriété intellectuelle et piller les fruits et le bien d'autrui.
A l'heure où nombre d'actions gouvernementales sont dirigées à l'encontre des pirates de l'Internet, il est assez cocasse de voir un organisme public se comporter comme tel, mettant à disposition des images, séquences, musiques qui ne lui appartiennent pas (contrairement à ce qui est indiqué dans les conditions générales d'utilisation publiées sur le site) et pour lesquelles il n'a obtenu aucune autorisation !
Ah, il doit s'agir de ce que l'on nomme la loi du plus fort, le fait du prince ou .....?
Pire !
Non seulement l'Ina s'exonère de tout ce qui serait demandé à n'importe quel diffuseur sur n'importe quel réseau de diffusion (radios, télévisions, presse etc...) ou à des organismes publics tels que les Musées Nationaux (en 2008, le Musée des Arts décoratifs de Paris a organisé une exposition intitulée « La Pub s'anime » et pour laquelle il a pris le soin de s'entourer de toutes les autorisations nécessaires auprès des ayant-droits des œuvres et objets exposés), mais en plus, l'INA entend rentabiliser sa « mise à disposition ».
N'indique-t-il pas dans ses communiqués de presse, être sous contrat de régie publicitaire chez Orange afin de « rajeunir son audience », se placer comme le complément de chaînes web communautaires comme YouTube ou Dailymotion ?
Mais ne nous trompons pas... Voilà un établissement public qui indique être investi d'une mission de service public de mémoire de l'audiovisuel mais qui, dans le même temps, se positionne comme une société privée classique réalisant des opérations commerciales. Ainsi, de nombreux documents mis en ligne sur le site de l'INA sont actuellement téléchargeables ou gravés à la demande sur dvd dans la boutique moyennant paiement.
Ce qui peut être à la rigueur acceptable lors qu'il s'agit de documents émanant de sociétés publiques de production (ex SFP) et diffusés sur des chaînes publiques de télévision, ne l'est absolument plus pour des films publicitaires qui sont pour leur quasi -voire totalité- de source privée.
Il n'est pas possible de mélanger le genre -Public-Privé- aussi facilement.
Notons enfin bien sûr qu'à aucun moment l'INA n'entend rétribuer les différents ayants droits ayant participé à la réalisation des spots publicitaires sur les ventes effectuées via la boutique du site.
La société FAC télévision (Films Albert Champeaux), créée en 1959, a été un des plus importants studios d'Europe de dessins animés des années 50 à 80. Une des plus anciennes sociétés privées de production encore existante en France, elle a également produit et réalisé quelques centaines de courts-métrages et d'émissions de télévision. Son patrimoine filmique, en cours de remis en état, représente une époque importante de la création française.
La référence qui situe le mieux la société est le "petit mineur Balzac 0001", personnage fétiche du cinéma publicitaire, créé par Albert Champeaux.
Ce sont certains de ces films publicitaires pour la télévision que la société FAC télévision a retrouvés mis à la disposition sur le site de l'INA.
Aucune autorisation ne lui a été demandée ni accordée Aucune référence n'est faite aux noms des annonceurs, producteurs, réalisateurs, compositeurs..., les films (mal conservés ?) sont de qualité médiocre et, pour certains, ont été coupés.
En outre, ils sont proposés bruts de tout commentaire, explication ou remise dans le contexte.
Si l'INA est réellement un lieu d'archives de la radio et de la télévision à destination des professionnels, étudiants, universitaires... et du public en général, l'ensemble de ces destinataires doit pouvoir compter sur des sources d'archives fiables et suffisamment renseignées et la proposition actuelle de l'INA ne peut apparaître alors que comme une simple proposition commerciale.
Non, les films publicitaires réalisés par la société FAC télévision (Films A Champeaux) n'appartiennent pas à l'INA.
Non, l'INA n'a pas le droit de les reproduire ni les présenter sur son site sans l'autorisation préalable de la société FAC télévision ni sans respecter les mentions obligatoires des réalisateurs (entre autres).
Non, l'INA n'a pas le droit d'envisager de faire payer à l'internaute la copie des films réalisés par la société FAC télévision quel qu'en soit le support de cette copie.
La société FAC télévision ne peut que s'inscrire en totale opposition avec le système tel qu'il est actuellement mis en place par l'INA.
Elle demande à cet organisme de respecter sa vraie mission et de ne pas oublier que cette mission doit s'exercer dans le total respect de la légalité.