Cassie Black est sortie de prison. Elle est en conditionnelle et travaille à vendre des voitures de luxe Porsche aux scénaristes nouveaux riches d’Hollywood. Nous sommes à Los Angeles, ville fétiche de l’écrivain Connelly – qu’il a délaissée pour la Floride une fois son existence de journaliste terminée par un Prix Pulitzer sur les fameuses émeutes de 1992. Mais Cassie Black a un secret. Le lecteur le découvrant à mesure, je ne dévoilerais rien. Elle ne peut pas rester ainsi à ne « rien » faire, surveillée par son énorme Noire de flic femme, à laquelle elle doit des comptes durant sa liberté conditionnelle. Condamnée 5 ans auparavant pour complicité d’escroquerie au casino ayant entraînée mort d’homme – son propre compagnon ! – elle est libérée sous condition afin de se réinsérer. Ray, ancien taulard, lui a offert sa chance dans le commerce des Porsche. Mais elle est travaillée d’un rêve et le temps lui est long.
Elle replonge donc dans ce monde interlope des jeux de Las Vegas, qui lui ont pourtant apporté tout le malheur. Un superbe « coup » est monté par son ancien associé ; elle veut en être, un dernier avant de disparaître. Elles disent tous ça. Le cinq parties du roman sont comme les cinq actes d’une tragédie. Haletante, bien menée, sans un mot de trop. Assez de technique pour ravir les Américains ; assez d’action pour ne jamais faire oublier le cinéma ; assez de psychologie pour contenter nos petits cœurs qui palpitent – surtout vers la fin ! Comment le coup est monté, puis exécuté, est un chef d’œuvre de sobriété et de suspense. On ne quitte pas les pages des yeux. Comment ce qui devient, devient, fait changer de bain, du chaud au froid, voilà du grand art. Comment survient le dénouement est encore meilleur.
Pareil qu’après un sauna, vous ressortez de ‘La lune noire’ essorillé, décapé, incrédule : la vie peut donc être comme ça ? Elle peut. Nous sommes aux Etats-Unis, à Los Angeles, et Michael Connelly décrit ceux qu’il connaît bien, tout en ayant assimilé les ressorts d’Hollywood. ‘La lune était noire’ n’est pas un roman de gare – qu’on laisse sur un banc une fois le train arrivé – mais un roman de train, que vous ne pouvez pas lâcher et dont vous avez besoin de la longue solitude du voyage pour apprécier !
Michael Connelly, La lune était noire (Void moon), 2000, Points policier 2007, 429 pages, 7.13€