Hier, dans le cadre de la compétition internationale du Festival Paris Cinéma 2009 était projeté « Memory of love », en présence de son réalisateur, le cinéaste chinois Wang Chao.
A Hongzhu, une jeune femme mariée, He Sizhu (Yan Bingyan), et son amant Chen Mo (Jiao Gang) ont un accident de voiture. Quand elle se réveille à l’hôpital où Li Xun (Naiwen Li), son mari, travaille comme chirurgien, He Sizhu a tout oublié des trois dernières années. Son amant est ainsi devenu un inconnu pour elle. Connaissant alors sa trahison, son mari choisit de la laisser vivre dans ce passé proche où ils étaient passionnément amoureux. Progressivement le fossé entre le temps et la perception de la réalité se referme. Le destin, inévitable, reprend le dessus. Li Xun doit alors dépasser sa peine causée par la trahison pour trouver la force de recommencer…
C’est donc à un habituel triangle amoureux que s’est cette fois attelé Wang Chao, sujet qui, contrairement à ses précédents films (notamment « Voiture de luxe » qui avait obtenu le Prix Un Certain Regard du Festival de Cannes 2006), se prête moins à froisser le pouvoir chinois. Malgré tout, hier le réalisateur a spécifié qu’il souhaitait rester pendant la projection pour voir la version internationale du film et notamment les scènes d’amour coupées en Chine (et on se demande franchement pourquoi tant elles semblent déjà édulcorées).
Si les ellipses, les approximations scénaristiques et les invraisemblances rendent l’histoire peu crédible, son évanescence lancinante portée par la musique (notamment de Ravel) nous embarque néanmoins, malgré aussi le jeu tout en retenue, parfois à la limite de la fausse note, des trois acteurs principaux.
Alors qu’Alain Resnais est habituellement le cinéaste indissociable du thème de la mémoire, Wang Chao en dissèque à son tour les méandres. Elle est ici un instrument du destin que He Sizhu va devoir retrouver pour prendre la bonne voie, même si ce n’est pas celle sur laquelle elle était initialement engagée. De longs plans séquences nous immiscent dans le cheminement que vont devoir effectuer les époux pour repartir de zéro. Avec sa mémoire c’est son passé que He Sizhu va reconstruire. Un passé idéal.
Le décor est très épuré, qu’il s’agisse du quartier chic et froid de Hongzhu ou de la compagne verdoyante où He Sizhu tente de reconstruire le passé. Deux mondes. Deux époques. Deux voies entre lesquelles il va falloir choisir. Les méandres de la mémoire vont alors la confronter aux méandres du destin, et à son ironie cruelle.
On quitte cette froideur lors des scènes de danse où la sensualité affleure sur un air envoûtant et mélancolique de tango qui, s’il parvient à nous émouvoir par instants, ne laissera malheureusement pas une trace indélébile dans notre mémoire mais plutôt la trace fragile d’une émotion elle aussi évanescente, malgré toute l’élégance de la réalisation , malgré toute l’élégance avec laquelle Wang Chao manie les silences évocateurs et malgré le charme de la reconquête de cet amour (é)perdu.
Sortie en salles : le 19 août 2009