Ce n'est pas seulement la présence de Ben Affleck qui donne à Jeux de pouvoir un côté nostalgique, voire ringard. C'est aussi plusieurs autres choses comme la référence aux thrillers politiques de Pakula et Pollack (Les Hommes du président, les Trois jours du Condor) et l'éloge sans illusion qui y est fait d'une presse papier en stade terminal. Ceci, loin d'être accessoire et joli prétexte à des remarques émues des critiques cinéma de ladite presse papier, est en fait la base même du film de Kevin Mc Donald.
Avant même les rebondissements d'une intrigue prenante, avant même l'esthétique (vintage, elle aussi), c'est le vocabulaire et les dialogues qu'il faudrait analyser. Entre Russel Crowe (le journaliste chevelu) et la responsable du site Internet du journal en question, entre ce même chevelu et la directrice du journal, entre tous ces journalistes et la police, il y a un grand débat lexical. "Comment appelle-t-on ce qu'on est en train de faire?" semblent vouloir récapituler épisodiquement les protagonistes. Dans la mêlée, on entend investigation, gossip, facts, blog, truth, case, scoop et - celui qui finira par s'imposer - story.
Peut-être voyez vous où j'en viens: la question de la presse d'investigation est intéressante, ici, dans la mesure où sa capacité à raconter une histoire est en question. Son autorité, en somme. Aussi l'intérêt de Jeux de pouvoir est-il moins dans les révélation, plutôt communes, mais dans cette histoire qui, sous couvert de rebondissements, met en question sa propre autorité, sa propre légitimité, comme Russel Crowe doutant de son ami. Et c'est aussi le thriller politique qui, avec Mc Donald, ne se fait guère d'illusion sur sa portée, qui n'est guère que celle du divertissement nostalgique.