NiL Editions
Traduit de l'anglais par Odile Demange
Paru en Mai 2009
317 pages
Quatrième de couverture: C'est une nuit calme sur Trachis Island, petite île paradisiaque où se croisent les oiseaux migrateurs, au large de la Nouvelle-Ecosse.Soudain, un bruit terrible déchire le silence: Kevin et Douglas, qui tiennent un hôtel sur l'île, voient un gros avion chuter brusquement et sombrer dans l'océan. Dès le lendemain, ils accueillent chez eux les proches des victimes. Venus d'horizons très différents, ces hommes et ces femmes que tout sépare vont construire une famille singulière, née de leur solidarité face au deuil. Un couple de Taiwanais qui a perdu sa fille fait des offrandes à son fantôme.Un musicien bulgare joue du piano en souvenir de sa femme violoncelliste. Un exilé iranien récite des poèmes persans pour sa petite-nièce disparue . Et puis il y a Ana, spécialiste de la migration des oiseaux, dont le mari, ornithologue lui aussi, est mort dans le crash. Peu à peu, à travers l'histoire d'Ana - son bonheur passé, l'infinie douleur de la perte puis, presque malgré soi, le retour à la vie - , à travers les liens qu'elle tisse avec les autres, Trachis Island deviendra pour tous le lieu de la renaissance.A propos de l'auteur: Ancien enseignant, auteur de littérature pour la jeunesse, régulièrement publié dans le New Yorker, le New York Times et l'hebdomadaire The Nation, Brad Kessler est l'auteur de trois romans.Hôtel des adieux, son premier livre traduit en français, a été récompensé par le Dayton Literary Peace Prize, le Rome Prize et le Whiting Prize.
Douglas et Kevin ont eu un coup de foudre pour Trachis Island, une petite île située au large de la Nouvelle-Ecosse. En hiver, l'île est calme, mais Kevin se prépare déjà à accueillir les touristes de l'été qui viendront se ressourcer. Par une nuit tranquille, un avion chute. Kevin pourra même voir les lumières rouges d'un fuselage qui est tombé à quatre kilomètres de son jardin. Il en gardera un souvenir traumatisant. Dès lors, Douglas s'active et part afin d'aider les secouristes. Kevin reste proscrit, enfermé à ressasser cette vision cauchemardesque. Lorsqu'il apprend que les familles des victimes séjourneront à l'hôtel, Kevin prépare avec soin leur venue. L'hôtel des adieux sera un lieu de chaleur, de douceur et d'accueil pour toutes ces personnes venues de loin dire un dernier au revoir à leurs morts...
Hôtel des adieux est un roman à la fois poétique et intimiste, attachant et douloureux. L'auteur écrit avec une justesse et une sensibilité assez émouvante qui mettent en évidence des émotions différentes. Chacun a sa manière de souffrir face au deuil: il y Ana, la femme de l'ornithologue qui reste silencieuse, murée et entourée par ses souvenirs, comparant à chaque fois qu'il lui est possible le destin de son mari avec celui d'un oiseau migrateur. Il y a Pars, qui a perdu sa nièce, iranien, il se réfugie dans les mots de la poésie perse, le couple taïwanais complètement perdu qui se rattache à leurs pratiques rituelles du culte des ancêtres en donnant des offrandes à leur fille afin qu'elle puisse traverser l'eau et atteindre l'au-delà, et il y a peut-être celui qui est le plus touchant: le mari bulgare qui souffre en silence, joue du piano pour rendre un dernier hommage à sa femme violoncelliste...Face au deuil brutal, chacun exprime sa douleur, réapprend les gestes quotidiens de la vie, réapprend le dialogue et le partage; aidé par un hôtelier de choix: Kevin qui n'aura de cesse de partager ces deuils, de respecter les frontières de l'intime et du recueillement tout en aidant à retrouver la sérénité. L'hôtel de Kevin sera le lieu de paix, où chacun pourra trouver en lui la force d'avancer. Le roman quant à lui coule très bien, les recherches, les démarches, l'enquête et ce voyeurisme dont fait preuve certaines personnes qui prennent un malin plaisir à prendre des photos sur le lieu du drame. Ce qu'il faut retenir de Hôtel des adieux est cette renaissance, ces liens qui s'unissent dans la perte, l'absence et la mort puis finalement ce beau message d'espoir éclatant de verve, qui après quelques années, même si la mémoire est ineffaçable et vivace, on reste là et on vit.
Un roman original, mélancolique où la réalité se mêle à une poésie des émotions et du silence...comme à contre-courant de la solitude, un combat malgré soi pour survivre à l'irréparable.
Merci à BOB pour l'envoi de ce livre et la découverte de Brad Kessler, un auteur que je continuerais à lire.