Comment monter un conseil syndical à partir de Rien? Un Conseil syndical ce n’est pas une ligne de noms, c’est une construction morale qui forme les piliers porteurs de la copropriété. Des guerriers aux épaules larges, suffisamment motivés pour venir en aide à l’immeuble physiquement et moralement. Le maintenir propre, éclairé, gardé, réparé, se préoccuper de la vie commune, de payer les factures, de protéger l’ascenseur fragile etc.
Je vais m’apercevoir très vite qu’il y a une grande distorsion entre des notions très simples de « Dehors» et de « Dedans».
Pour moi, mon dedans commence à la porte de l’immeuble et je dirai même au delà, à ma rue. Oui, mon dedans c’est partout où mon regard s’étend à partir de ma fenêtre. Et ce dedans, je ne peux imaginer de n’en être pas responsable à un degré ou à un autre. Or, le dedans, pour les gens de mon immeuble, s’arrête à la porte de leur appartement.
Nous sommes là dans des notions nouvelles d’espace commun et d’espace public…Les mentalités n’ont pas encore évolué. Lorsqu’elles évoluent, des différences très significatives se mettent en place. Ainsi à Anfa, (quartier très chic de Casablanca) les propriétaires ,non seulement entretiennent merveilleusement le jardin de leur villa, mais ils entretiennent aussi et avec autant de soin, les bordures et pelouses de leur rue.
J’ai constaté avec amusement dans certaines rues du quartier du Polo, le même phénomène à l’œuvre. Celui qui veut s’élever socialement, après avoir construit une belle maison, a à cœur de fleurir et verdurer sa rue.
Première tristesse, dans mon immeuble, le plus important propriétaire en millièmes, (salle de Sport et restaurant) non seulement ne paie pas un centime de charges bien qu’il roule en Mercédès, mais sans aucun scrupule scie à ras et donc, tue, un magnifique arbre d’une rue qui n’en compte déjà pas beaucoup parce qu’il gène l’extension de sa terrasse…
Fort de cet exemple, le magnifique palmier de 30 ans d’âge, athlète longiligne qui dépassait les immeubles en face de moi et tutoyait les étoiles, est terrassé par les fondations d’un petit immeuble misérable, sorti de terre à la va vite et qui va insulter le paysage Marrakchi pendant des décennies…
Que faire lorsque le sens de l’intérêt général, n’est pas la règle?
Une jeune femme, éloignée de son bureau de comptable pour mettre au monde ses enfants et qui reprend ses activités, va me redonner beaucoup d’espoir : Son mari, un jeune type très sympathique et plein d’idéal, contrôlera le travail des gardiens et elle nous tiendra les comptes.
J’appelle quelques Copropriétaires au téléphone, avoir les téléphones est déjà une gageure… La plupart n’habitent pas Marrakech… Ils ont investi un jour dans cet achat, y reviennent quasiment en catimini pour de rares séjours, sans se poser la question de savoir comment leur immeuble tient debout. Si vous les pressez gentiment de payer leur cote part, ils vous répondent avec naïveté: « mais moi, je ne suis jamais là» , sous entendu, je ne profite pas des choses… Ou alors autre constante …» Untel ne paie pas, pourquoi moi, je vais payer» …
Tout est bon pour se soustraire à une norme que l’on n’a pas encore intégrée. Le Marocain adore la pierre. Dés qu’il le peut et même lorsqu’il ne le peut pas, il investit dans l’immobilier. Cela semble très facile ici d’obtenir des crédits immobiliers. Il y a toujours un parent ou un ami bien placé pour donner un petit coup de main à un dossier de prêt ou même vous fournir des fiches de paie… Le résultat est que l’on achète facilement, sans vraiment avoir les moyens et que l’on est forcément très juste avec les remboursements. Evidemment, il n’y a strictement aucun budget de prévu pour l’entretien du bien immobilier que l’on vient d’acheter.
Le moteur social est un puissant levier sur les pulsions d’achat. On achète pour soi mais on achète beaucoup pour les autres, pour ce que les autres vont en dire. Et la première pièce de la maison, celle qui concentre tous les soins est le salon. Rentré dans les mœurs en occident, sous le nom de Salon Marocain…une culture de vivre vraiment magnifique qui permet de recevoir, faire manger et même héberger un très grand nombre d’invités et relègue aux oubliettes nos salle à manger archaïques et guindées.
Le Marocain est optimiste et débrouillard et pense qu’il trouvera des solutions le moment venu. Sa structure psychique très pénétrée de spiritualité lui rappelle en permanence que nous sommes des Etres éphémères. » Inch Allah» , qui ponctue tous les projets et le moindre rendez vous, est la traduction que, in fine, c’est Dieu qui décide. Le grand mot ici, est Dépannage. Tout est provisoire et éphémère. L’avenir est très peu pensé. Toute l’attention est absorbée au quotidien.
Qui a raison ? Entre la mentalité Occidentale qui à l’aide de la raison, verrouille tout, même la vie, et la mentalité Orientale qui accorde avec humilité place au destin, je l’ignore… entre les deux sans doute.
Est-ce que cela fait avancer mon immeuble ? Non ! Parce que la civilisation de la pierre et du matériel que nous avons mise en place a besoin du ratio et que le goût très prononcé des Marocains pour l’immobilier doit s’accompagner de la prise en compte de l’entretien de cet immobilier sous peine de se retrouver avec des quartiers hyper dégradés. Fortes de cela, les autorités judiciaires aujourd’hui sont de plus en plus sévères pour les négligents qui plombent les Copropriétés par leur mentalité de mauvais payeurs.
J’ai fixé la date de l’Assemblée Générale. J’ai l’autorisation du Caïd qui va m’envoyer deux Mokkadems pour en superviser la parfaite légalité. J’ai envoyé mes convocations à l’immeuble avec AR avec un ordre du jour précis et détaillé. J’ai fait des photos avant/après de toutes les améliorations qui ont été faites et ces photos sont affichées dans le hall. J’ai affiché la dite réunion dans les délais. J’ai appelé au téléphone tous ceux que j’ai pu appeler en essayant de les motiver pour être présents…
Demain, enfin, c’est l’Assemblée Générale !
Tous ceux que j’ai eu au téléphone, m’ont assurée qu’ils seraient présents…Inch Allah… Donc… A demain… Si Dieu veut…
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