La découverte de Ken Loach a été un des incidents qui a marqué ma vie de spectateur. Raining stones et Riff raff ont été des chocs : personnages à qui on avait retiré tout avenir, monde absurde. En fait, mon interprétation était probablement fausse. Mais ce fut quand même un choc.
Les derniers films de Ken Loach n’ont plus le même effet sur moi. Ils ne sont plus désespérés, au contraire. Ils montrent que le petit peuple de laissés pour compte anglais peut se tirer honnêtement des terribles problèmes qu’il rencontre, gangs, préjugés raciaux, etc. La solution : retrouver ses valeurs de « decent people ».
Exemple. Apologie du match de foot, seul moment où l’on peut brailler, se saouler, et être avec ses copains. Et c’est parce que cette amitié s’est endurcie match après match que l’on peut compter sur eux quand on est en difficulté.
Et Cantona ? Les quelques séquences de match montrent que Cantona n’était pas un footballer ordinaire : toujours droit et digne même après avoir marqué un but, comme sur une autre planète, un martien. Effectivement, comme il le dit, peut-être a-t-il vu la dimension sociale du football, le football comme art ? Et il voulait faire un « cadeau » aux spectateurs ? Peut-être ceux-ci l’avaient-ils compris ?
En France Cantona a été jugé ridicule. D’ailleurs, a-t-il vraiment compté pour le football national ? Nous sommes nous trop attachés à ses petits travers, petits ridicules ? Mais étaient-ils ridicules ? Avons-nous été trop myopes ?, trop paresseux ?, trop jaloux ?... pour voir ce qu’il avait d’exceptionnel ? Sommes nous un peuple d’envieux mesquins à qui le génie fait peur, parce qu’il condamne une médiocrité dont nous nous sentons incapables de sortir ?