Ici le temps peut bien s'arrêter... jusqu'à demain.
Si la fin du monde est prévue pour 2012, le dernier bastion de l'humanité devrait venir se réfugier ici. A l'ombre d'un soleil de plomb, la maison de Bill Bokey est un oasis de poussière dérivant au milieu des vignes. Une poignée d'hommes et de femmes y luttent contre les éléments depuis bientôt trois jours pour une seule raison : vivre trois jours d'électricité sans limiteur de son.
Seul journaliste à bord, le terrain de jeux qui s'étend devant mes yeux a des airs de jardin pour enfants freaks: un hameau complet, découpé en trois bâtiments d'une pierre grise et d'un ciment fossile dont les murs résistent difficilement à l'assaut d'une végétation sauvage et vigoureuse. Organisé autour de deux bassecours et d'un potager, la scène centrale du Willstock festival partage son toit avec un entresol de bois et de pierre d'où votre rédacteur observe les opérations en cours : construction des stands, création d'une cabane de massage, disposition d'étoffes rouges reflétant des ombres ambrées sur les bâtiments. Planqué dans la pénombre et l'humidité des pierres, le journaliste veille sur l'horizon qui n'offre à voir qu'un tapis de vigne et une dizaine de maisons. La lumière pâle nuance chaque couleur, créant des reflets luisants sur la petite dizaine d'hommes et de femmes qui s'agitent pour finir tous les préparatifs du festival.
J'admire personnellement l'attention que peuvent porter les femmes envers des considérations souvent proches de la folie furieuse du type " quel tirant de corde utiliser sur ma Telecaster 73 ?"
Le Willstock commence donc calmement. Un calme qui sautera en seulement quelques heures après l'amorce d'une tempête arrachant les barnums à leurs sols de poussière. La gronde est alimentée par le flux continu des nouveaux arrivants : les Ravenhill aux complet, Graham et les Electric Circus, A Song... La pyramide des âges écroulés, les esprits s'aiguisent et le cirque peut enfin commencer. Le blues tout d'abord que Mark et Graham jouent. Plus tight, plus vicieux que la veille, il ne s'agit plus d'un divertissement mais d'une préparation de la scène. On admire, tout autour de nous, une faune de passionnés De cette espèce qui laboure les notes de leurs guitares, ceux qui amènent un Fender Rhodes Mark 1 et un orgue Hammond sans vraiment savoir qui va les utiliser... Ils sont là, toujours à s'émerveiller du jeu d'autres musiciens. Meilleurs qu'eux à ce qu'ils disent. Alors qu'ils sont déjà un miracle.
Il est 2H05. Je viens de me taper le plus long temps de constipation de toutes mes vies. Cortez the Killer résonne dehors dans une jam nerveuse, souvent détournée par Sly (chanteur des Ravenhill) et quelques chansons blagues. La nuit s'enfonce comme mon cul dans un canapé. J'essaye de parler à Graham de sa première partie des Stones en 1969. Il est de mauvais poil, caustique à souhait. Il répond à ma question par une autre « Do you have weed, marijuana, hashich... ». L'inquiétude le gagne quant à sa guitare qu'il va utiliser le lendemain.
Six heures du matin et mon sommeil fiévreux est ponctué d'un couple de guitares roulantes comme deux serpents dans les herbes hautes. Entremêlé, sifflant, mon esprit comprend qu'il ne s'agit pas d'une hallucination : deux tarés sont en train de balancer les amplis à fond pour faire fuir les fantômes du coteau. Une prière préliminaire pour mettre toute les chances de leur coté dès le lendemain.
A suivre donc...
http://www.myspace.com/willstockjam
Graham Neil & Mark Keen, live from Willstock: