Depuis quelques jours maintenant, on reparle de l’attentat de Karachi. Pourquoi ? En quoi La France est elle impliquée ?
Quels sont les faits ?
Le 8 mai 2002, huit mois après les évènements du 11 septembre, un bus transportant des ressortissants français explose à Karachi (pakistan). 14 morts dont 11 français de la direction des constructions navales (DCN), entreprise dépendant de l’état français.
Première piste, logique après le 11 septembre, et qui plus est, visant des occidentaux dans un pays musulman, la piste des fondamentalistes musulmans est privilégiée. Deux islamistes seront arrêtés et condamnés. L’affaire pourrait s’arrêter là… Seulement, voilà, au mois de mai de cette année, ces deux personnes ont été acquitées en appel, pour manque de preuves.
Deuxième piste pour expliquer cet attentat, une menace des services secrets pakistanais sur la France pour empêcher un contrat militaire entre la France et l’Inde, grand adversaire du Pakistan. Piste possible à condition que l’ISI (services secrets pakistanais) ait une source suffisemment bien placée dans l’état major Indien pour connaitre des tractations secrètes entre un Etat, l’Inde, et plusieurs fournisseurs dont la DCN. Au moment de l’attentat, rien n’était signé entre la DCN et l’Inde. Une simple manoeuvre de déstabilisation devait-elle entrainer un attentat mortel ? A voire …
Troisième piste, le mécontentement des commissionnaires pakistanais. C’est, aujourd’hui celle qui fait le plus de bruit. C’est aussi, selon l’avocat des familles de victimes, celle qui est, pour l’instant, la plus probable.
Il faut savoir que la DCN était au Pakistan pour construire des sous marins suivant un contrat passé en 1994 entre le gouvernement Balladur et le Pakistan. Ce genre de contrat passe souvent par des intermédiaires qui facilitent les négociations et sont payés légalement par des commissions. Mais certains intermédiaires, pour avoir droit à une part du gâteau, rétrocèdent un morceau de cette part à leur commanditaire. Cela s’appellent les rétrocommissions. Or, après son élection en tant que Président de la République en 1995, Jacques Chirac a demandé à bloquer le paiement de “commissions pouvant conduire à des rétrocommissions”. Charles Millon, le ministre chargé du dossier à l’époque le reconnait formellement. Si on admet que des commissions devaient être versées à des intermédiaires (par exemple des membres de l’ISI pakistanais) et qu’une partie devait revenir au commanditaire (par exemple certains membres de l’état français), si on admet aussi que certains candidats en 1994 avaient besoin de fonds pour financer une campagne présidentielle parce que le trésor de guerre de leur parti était tenu par leur adversaire (à l’époque, Jacques chirac était président du RPR, parti de Balladur qui voulait se présenter contre Chirac). Alors ne manque que le lien pour prouver que “peut-être” une filiale luxembourgeoise de la DCN aurait “peut-être” versé des rétrocommissions à des sociétés proches de certains hommes politiques français en manque d’argent. C’est justement ce que chercheraient à établir les deux juges Y. Jannier et M.Trévidic chargés de l’enquête.
Si, pour empêcher un adversaire politique, Jacques Chirac a bloqué ces commissions, il a aussi frustré les commissionnaires pakistanais. Des tractations auraient existé pour trouver un terrain d’entente. Ces tractations n’auraient pas abouties. Les commissionaires auraient ensuite voulu faire payer la France pour cet argent perdu. D’où l’attentat…
A ce jour, ce qui est prouvé et publiquement connu :
- le type d’explosif utilisé était de type militaire
- certains services secrets “amis” ont affirmé aux services français le rapport entre l’attentat et les commissions
- certaines pièces de l’instruction (montrant le lien entre l’attentat et les commissions) faites à karachi ont été annulées par la justice française pour “vice de compétence territoriale”
- certaines commissions sur le contrat des sous marins ont été bloquées à la demande expresse de J. Chirac
- Un contrat de ce type concernait le premier ministre E Balladur, le ministre de la défense F Léotard, le ministre des affaires étrangères A Juppé, le ministre de l’économie E Alphandéry, le ministre du budget N Sarkozy
- a partir de début 95, N Sarkozy est officiellement nommé porte parole de E Balladur “candidat à la présidentielle”. Il est la pièce maitresse de la campagne de Balladur.A cette place, et en tant que toujours ministre du budget, il est évident que les apports financiers de la campagne lui sont connus.
Ce qui aujourd’hui n’est pas prouvé et publiquement connu :
- le nom des commanditaires de l’attentat
- le motif initial de l’attentat
- le lien direct entre le refus de payer les commissions et l’attentat
- le lien direct entre les rétrocommissions et certains membres du gouvernement français de l’époque
- pour l’instant la piste des rétrocommissions s’appuie sur un faisceau d’indices mais les juges n’ont toujours pas terminé leur instruction.