Lorsque mon ami, BiblioMan(u), m'a présenté les parutions à venir, des éditions Métailié, collection "Noir", allez savoir pourquoi, j'ai choisi Le jour où j'ai tué mon père du brésilien Mario Sabino.
Sans raison particulière, autre que ce titre qui m'a parlé. Qui a hurlé même.
Un peu à la manière dont j'avais choisi à la bibliothèque municipale, à 14 ans, et en cachette (c'est du moins ce que je croyais), "Quand j'avais 5 ans je m'ai tué" de Howard Butten.
Des titres ambigus, qui mettent mal à l'aise, parce qu'ils parlent d'interdit ou de tabou.
Et c'est bien cela que j'ai trouvé dans l'extraordinaire roman noir de Sabino.
Antonimo est enfermé. Où ? Je ne sais pas.
Et il dialogue. Avec qui ? Je ne sais pas non plus. A moins que ce ne soit avec moi.
Et puis, je comprends, que c'est avec une psychanalyste qu'il dialogue. Et qu'il est probablement enfermé dans un hôpital psychiatrique, à moins qu'il ne soit en prison.
Antonimo a tué son père.
Je n'ai pas d'histoire à vous esquisser pour vous donner envie de lire "Le jour où j'ai tué mon père".
Ici tout est psychologique, ou de l'ordre de l'idée et du ressenti.
Ce que je peux vous dire en revanche, c'est que je n'avais pas lu, depuis belle lurette, un roman aussi noir.
Un roman sous lequel gronde et grouille plus de deux mille années d'humanité, de philosophie, de religion, de psychanalyse.
Les questions soulevées sans cesse par Antonimo, m'ont plongé dans un profond mal-être, dans une gêne que j'aurais ici bien du mal à vous expliquer.
Peut être parce qu'elles ne m'ont pas laissé indifférente.
Tout se croise dans ce puzzle, tout et tout le monde. Les mythes, les penseurs, les écrivains, la réalité et la fiction, les dieux, les hommes, les femmes, les pères de sang, les pères de cœur, les mères biologiques et celles que l'on adopte plus tard.
Le tout dans une force, une finesse et une intelligence rares qui font de ce roman à la lecture pas forcément toujours facile, un chef-d'œuvre en son genre.
Vous avez envie d'être bousculé par un auteur brillant, vous vous êtes toujours posé des questions sur le sens de tout ? Vous êtes prêts à vous laisser envahir par la gêne, la nausée provoquée par les questions qui font comme les cailloux que l'on jette dans les eaux calmes, des ronds concentriques ? Vous êtes prêts à marcher avec un caillou dans vos baskets le temps de la lecture du roman de Sabino ? Alors n'hésitez plus. Vous êtes prêts pour affronter l'existentialisme de Le jour où j'ai tué mon père.