Les Wampas, Izia, Syd Matters, Stuck in the Sound
et Anthony Joseph and the Spasm Band ce week end à l'Hippodrome de Longchamp...
Solidays, ça brasse large et c’est normal. On y vient pour le soleil, pour une chouette ambiance et un peu quand même aussi parce que le sida, il ne passera pas par nous.. Noble cause oblige,
c’est un festival qui ne s’encombre pas de cohérence esthétique, plus proche dans son esprit de la Fête de l’Humanité (ses stands, ses pétitions, ses manèges, sa bouffe de tous les pays, ses
jeunes à dreadlocks) que de Villette sonique. À Solidays, on chante Bella Ciao et Hasta Siempre Comandante avec les sympathiques Mouss et Hakim, on ne peut pas faire trois pas
sans tomber sur un concert de reggae. Et cette jeunesse-là, habillée trop large dans ses ponchos et ses fringues ethniques, elle continue, bien campée dans ses sandales, de résister à la
dictature du slim, du tee-shirt moulant et de la Converse vintage.
Pas si rock Solidays, dans le fond, mais consensuel, lisse, plutôt bon enfant. On le sait en y allant. Il n’y
a donc pas lieu d’être déçu. D’autant que les toilettes y sont d’une propreté ahurissante (à notre tour, à l’instar de chaque artiste se produisant durant ces trois jours, de
remercier-les-bénévoles – voilà c’est fait). Et puis à la fin du week-end, c’est Manu Chao qui nous dit au revoir car Solidays, ouais, c’est alter à donf. Mais, nous, faut pas déconner, on est
déjà dans la navette du retour, parce que, bon, à quoi ça sert de voir Manu (oui, à Solidays, tout le monde le connaît intimement et l’appelle Manu) quand tout ce qui nous intéresse dans son
répertoire, c’est le boulet Mano Negra qu’il se traîne depuis des lustres et qui fait que, malgré d’ennuyeux albums solo, on continue à bien l’aimer quand même… D’ailleurs, on n’aura pas été voir
non plus la carte blanche à Kool Shen parce que, franchement, ce qui nous bottait, c’était NTM, et que sans JoeyStarr, bon…
En tête de gondoles, du coup, The Do, Keziah Jones ou Izia, en ambassadeurs d’une variété rock "de qualité",
étaient bien à leur place à l’Hippodrome de Longchamp (comme Patrice, l’an dernier, tiens…). Le genre d’artistes qu’on voit à la télé, estampillé Taratata, tout comme ceux que l’on voulait à tout
prix éviter (Benabar, La Grande Sophie, Sinsemilia, Ayo, ce genre…). Et ce n’est pas leur faire injure que de préciser que chacun excella dans son registre – attendu – sans bouleverser, sans
surprendre.
Keziah Jones a ainsi compris que son dernier disque était vraiment trop paresseux et mit plutôt en avant des
morceaux de son splendide Black Orpheus. Le guitariste nigérian s’avère certes toujours aussi poseur, légèrement agaçant, mais sa reprise toute personnelle de All Along the
Watchtower, ni hendrixienne ni dylanienne, fut l’un des moments les plus enthousiasmant du week end. Enfin, après mon sandwich aux falafels du samedi soir.
The Do, je ne sais pas, j’aime assez leur album fourre-tout, mais les nouveaux morceaux, plus mollassons,
n’augurent pas du meilleur pour un prochain opus. Mais, bon, peut-être ai-je cette impression juste parce que j’étais, durant leur set, vautré dans l’herbe et somnolent… Ben oui, à un moment
donné, il faut savoir s’arrêter de courir d’une scène à l’autre. On n’a plus vingt ans, quoi !
Sinon, le dernier jour il y eut Izia, qui, objectivement, avait tout pour me plaire (fille de son père,
références heavy rock seventies, guitare SG, charisme indiscutable), mais pour qui un je-ne-sais-quoi de convenu, de formaté – un manque d’originalité surtout – m’empêchèrent d’adhérer
complètement à sa prestation électrisante. C’est en tout cas un euphémisme que d’écrire que la petite fille que son père chantait il y a près de vingt ans dans Ce qui est dit doit être
fait a mis le feu au festival…
Toutefois, si Izia connaît sa Janis sur le bout des doigts, le rock français à Solidays, ce furent surtout
les excellents Stuck in the Sound qui l’incarnèrent le mieux le vendredi, puis les Wampas, bien évidemment, le dimanche. Didier Wampas est toujours aussi mal fringué et le vingtième degré sied
toujours aussi bien à son gang tout droit issu d’une BD rock régressive. Les Wampas en live, c’est du cartoon, du cirque punk pour rire dont on ne se lasse pas. Des Bottes rouges à
Ce soir c’est Noël en passant par C’est l’amour ou un Manu Chao de circonstance, le groupe "qui a inventé le rock & roll" s’est encore imposé comme champion toutes
catégories de la prestation live sans filets, Didier proposant même, avec son micro dans le falzar, une toute nouvelle illustration de ce que peut être un instrument percussif.
Et puis il y eut aussi, pour le meilleur, Syd Matters et ses harmonies pop au bon goût assez irrésistible
ainsi que Poni Hoax et son post-rock dansant et adulte, bizarre anomalie dans une programmation ne tolérant qu’exceptionnellement des chanteurs au crâne si désavantageusement dégarni et au
costume si bien coupé. Vraiment classe, ce groupe évoquant parfois un Joy Division matiné de disco, qui, jadis, accompagna Jeanne Balibar pour la tournée consécutive à son deuxième album solo, et
qui, à Solidays, nous changea un peu des branleurs ou des gravures de mode faisant habituellement vendre des disques et des posters.
On passe vite sur l’escroquerie Internet que sont les Naive New Beaters et sur les plaisants Ting Tings,
découverts ici-même l’an dernier, mais que l’on ne revit pas ce coup-ci car on avait mieux à faire sur une autre scène. Samedi, à 23 heures, Anthony Joseph, performer bondissant (voir ici la chronique de son album par G.T.), donna en effet un concert fabuleux, entouré de ses six musiciens (dont trois
percussionnistes tout de même). Soit une heure pour définir enfin ce qu’est le groove (ce truc essentiel que Stephanie McKay – une sous-Macy Gray bien consensuelle programmée l’après-midi même –
aurait dû un peu réviser). Beau cadeau, le groupe d’Anthony Joseph fut même rejoint au rappel par un Keziah Jones inhabituellement humble.
Alors, comme on dit à la fin d’un festival, rendez-vous en 2010. Ou pas.
Bonus Track : tout un concert d'Anthony Joseph and the Spasm Band filmé à l'Olympic de Nantes le 24 avril dernier, ici.