C’est une grosse nouvelle pour Montréal. Louise Harel, ex-membre du Rassemblement pour l’Indépendance Nationale, ex-députée d’Hochelaga pour le Parti Québécois durant 27 années, ex-ministre péquiste durant près de 9 ans qui, il y a à peine quelques mois, prenait sa retraite de la politique vient de décider de se lancer dans l’arène politique municipale en tant que candidate à la mairie.
Elle est devenue, en un tour de main, chef du parti Vision Montréal grâce à Benoit Labonté, chef démissionnaire, qui lui lègue la direction du parti. De plus, Labonté renonce à sa décision d’être candidat à la mairie et fera équipe avec Louise Harel qui lui a promis la présidence du comité exécutif, si elle gagne.
Ma première réaction à cette importante annonce fut positive puisque nous aurons enfin une vraie compétition pour la mairie de Montréal et que ce fait favorisera l’augmentation du taux d’électeurs qui se situe normalement en bas 40%. Je crois que plus de participation génère plus de démocratie et résulte dans une meilleure administration.
Louise Harel connaît bien tous les rouages de la politique québécoise. Elle a été, particulièrement, ministre des affaires municipales et ministre responsable de la Métropole. Elle est donc familière avec les lois, la gestion et les problèmes de Montréal. Louise Harel fut une politicienne compétente, intègre, sérieuse, têtue, autoritaire et aimée par les gens de son comté.
Je l’ai rencontrée la première fois lors de l’inauguration des travaux de construction du centre de recherches CRIQ à Montréal, où elle représentait le PM René Lévesque. Malgré que je fusse alors partisan d’un autre parti politique, ma firme avait obtenu ce mandat de génie conseil grâce aux nouvelles politiques mises en place par René Lévesque, par lesquelles il n’y avait plus de favoritisme dans le choix des professionnels. À ma grande surprise, le système établi m’avait permis d’être choisi. J’eus l’opportunité d’échanger quelques mots avec Louise Harel qui me demanda qui je représentais. Lorsque je lui annonçai que j’étais l’ingénieur du projet, elle s’empressa de me féliciter. Il était clair qu’elle ne savait absolument pas qui étaient les professionnels du projet. Quelle différence avec le passé, où les ministres et députés étaient toujours impliqués dans ce genre de décision et avaient leurs favoris. Nous vivions un temps nouveau et Louise Harel en était fière. C’est ce dont Montréal a besoin aujourd’hui, soit un système par lequel toutes les firmes ou entreprises ont une chance égale de décrocher un contrat de la ville sans connivence ni favoritisme.
J’ai aussi vu Louise Harel en action à Québec. Là, elle était toujours très sérieuse, bien préparée et constante dans ses idées. Aux comités de l’assemblée nationale, elle ne laissait rien passer, parlait très franchement et défendait bien ses dossiers ou son point de vue. Cependant, il y avait trop souvent un aspect désagréable à son approche. Ses remarques devenaient parfois acerbes, déplacées et moqueuses envers les députés des autres partis. Elle n’était pas la seule à agir ainsi mais Louise Harel démontrait davantage un fanatisme politique teinté par son option politique qui était l’indépendance du Québec, et qui était inutile au débat.
Louise Harel est une femme têtue et l’a démontré clairement lorsqu’en tant que ministre des affaires municipales elle a proposé la fusion d’un très grand nombre de municipalités au Québec, dont celles de la région de Montréal. Avant ce jour, Montréal allait bien et faisait de grandes choses. Il y avait certes des débats intenses au niveau de la Communauté Urbaine de Montréal. Mais cette dissension venait du fait que Montréal était majoritaire à la CUM et que les municipalités environnantes plus petites ne voulaient pas contribuer leur juste part au fardeau fiscal de la CUM malgré qu’elles bénéficiaient des avantages. Au lieu de s’attaquer à régler ces conflits, Louise Harel a décidé d’abolir la CUM et de fusionner les villes de l’île de Montréal en une grande ville.
Partout au Québec, où les fusions proposées faisaient disparaître des villes, leurs citoyens se levèrent et demandèrent au ministre Harel de tenir des référendums dans leurs municipalités respectives avant de voter le nouveau projet de loi à l’Assemblée Nationale. Louise Harel refusa. Les conseils de ces villes organisèrent alors eux-mêmes les référendums. Partout des majorités allant de 75% à 90% se prononcèrent contre la fusion. Autoritaire, Louise Harel refusa de reconnaître ces résultats. Elle fit adopter la loi et les fusions eurent lieu. Ce fut le début de dépenses incroyables, de mésententes, d’insatisfaction généralisée, etc..
Dans mon blog récent « un maire à notre mesure » j’ai énuméré les qualités que je crois nécessaires au prochain maire de Montréal. Plusieurs sont bien comblées par Louise Harel. Mais certaines ne le sont pas, dont celle de favoriser la consultation des citoyens. Louise Harel a démontré dans le passé qu’elle n’écoute pas et refuse la consultation populaire. Pour elle, si élue, elle va mener. C’est une façon de faire que je ne partage pas car si, par exemple, elle avait respectée les décisions des référendums sur les fusions, nous ne serions pas pris dans le merdier où nous sommes aujourd’hui.
Je ne diminue aucunement la responsabilité du PM actuel Jean Charest dans le mélimélo actuel de la Ville de Montréal car il a, lui aussi, contribué grandement à tous nos problèmes actuels en voulant, par la suite, régler les problèmes découlant des fusions en permettant les dé-fusions.
Ce sera une élection dont le résultat sera serré. Pour gagner, Louise Harel devra pouvoir faire taire les bruits que sa candidature génère déjà et qui semblent créer un début de polarisation de l’opinion publique. Il ne faut pas que cette élection soit une affaire de fédéralistes contre séparatistes, anglophones contre francophones, riches contre pauvres, etc… L’intérêt supérieur de Montréal demande que le prochain maire soit le maire de tous les Montréalais et de toutes les Montréalaises.
Louise Harel, pour être élue, devra convaincre les électeurs montréalais qu’elle va mettre de côté ses penchants politiques nationaux pour se dédier exclusivement à faire de Montréal une ville où il fait bon vivre pour tous les Montréalais et Montréalaises. En est-elle capable ?
Quant au maire Gérald Tremblay et son parti, ils ont maintenant devant eux une opposition valable. Malheureusement, Tremblay arrive en campagne électorale entaché d’éclaboussures qu’il dit ne pas mériter. Il est vrai qu’il a toujours été reconnu comme un homme d’une honnêteté et d’une intégrité totales. Il a travaillé ardemment pour la ville, mais, pour remporter la victoire, il devra démontrer, sans aucun doute, à la population montréalaise qu’il est la victime innocente des scandales qui l’affectent et comment il va mettre de l’ordre dans son équipe pour l’avenir.
Je leur souhaite bonne chance.
Claude Dupras