Davantage que la victoire de Marine Lepen, c’est bien un Parti Socialiste déliquescent qui serait durement et justement sanctionné. Comme trop souvent, on ne manquera pas d’ajouter que tout cela est local… ah cette fameuse immunité du local qui permet avant tout de se dispenser de toute réflexion de fond sur nos pratiques, sur nos idées.
Pourtant, le système mis en place à Henin-Beaumont est révélateur de ce que devient le Parti Socialiste depuis plusieurs années.
Un parti dont les pratiques rappellent désormais les heures les plus sombres du socialisme municipal de la défunte SFIO. Un conglomérat de notables dont le lien avec les réalités se distend à mesure de l’érosion militante ; le résultat en est un clientélisme qui devient la « seule matrice idéologique ».
Vidé de tout contenu, de toute ambition, les sections sont devenues des vases clos grisonnants où quelques "lionsots" peuvent s’ébattre pour devenir dans un premier temps des apparatchiks et dans un second temps, si ils ont bien servi leur maître, devenir à leur tour des notables. Ce phénomène est d’autant plus commode que le jeu de l’alternance démocratique externe est quasi nulle et le débat interne ne peut plus exister puisque vicié par un réseau d’obligés bien installé. En un mot, quiconque serait tenté de s’opposer aux hommes en place, n’aurait non pas le choix de vaincre ou de périr mais de se plier ou de périr. Dans certaines communes, le clientélisme atteint un tel paroxysme qu’on ne s’étonne plus de voir des taux d’adhésion à un parti politique (le PS en l’occurrence) sans commune mesure avec le reste du pays, et notamment dans le personnel municipal.
Le tableau s’assombrit encore un peu plus quand on aborde la question du réseau plus restreint des notables. Celui-ci est parfaitement installé où chacun se tient gentiment avec des jeux de chaises musicales parfaitement rodés. On se souvient des soutiens répétés de la Fédération du Pas de Calais à des personnages encombrants (et Dalongueville n’est pas un cas isolé).
Institutionnalisé, cette « gouvernance » est malheureusement validée par la direction du PS et aurait peut-être même tendance à faire école. C’est ce fameux repliement sur le local considéré comme la seule ligne qui vaille. Cette réalité n’est pas le fait de Martine Aubry, c’est une tendance qu’on observe déjà sous Hollande.
Hélas, la Première Secrétaire loin d’infléchir ce mouvement tend à le renforcer et par conséquent les déviances qui en découlent (clientélisme, féodalisme, clanisme…). Les propos de Catherine Génisson sont à cet égard révélateurs puisqu’elle considère que «le problème central d'Hénin-Beaumont, c'est surtout la déviance d'un individu et le climat délétère d'une commune. Cela fait un terreau idéal pour le FN. Mais la division du parti a commencé dès 2001, quand un directeur de cabinet se présente contre son maire» (source Médiapart) or c’est bien le système mis en place dans le Pas de Calais depuis des lustres qui fait qu’on en est arrivé là.
Pour ceux qui douteraient, je ne peux que vous conseiller la lecture de l’article très complet de Médiapart avec ce commentaire du journalist qui a fait l’enquête « Beaucoup de témoignages de militants et élus locaux d'Hénin-Beaumont et du Pas-de-Calais ont été recueillis sous couvert d'anonymat. Toutes les personnes citées ont été jointes mardi, par téléphone ». Et moi, je ne mets pas de noms car je préfère me préserver…
J’en termine ici ma première partie. Demain, je la consacre aux incapacités de Martine Aubry à changer la donne dans le Pas de Calais comme ailleurs.