Malgré la politique de prévention contre les dangers de la consommation d’alcool pendant la grossesse, une enquête menée sur des forums internet révèle que de nombreuses femmes enceintes continuent d’en consommer.
Stéphanie Toutain, chercheuse au Centre de recherche psychotropes, santé mentale, société (CESAMES - Université Paris Descartes - CNRS - INSERM), souligne que la notion d’abstinence est mal comprise. Pourtant, le syndrome d’alcoolisation foetale, conséquence de la consommation d’alcool pendant la grossesse, constitue la première cause non génétique de handicap mental en France. Les résultats de cette étude démontrent la nécessité d’une sensibilisation de la population aux risques liés à la prise d’alcool, dés le souhait de la conception d’un enfant et a fortiori pendant la grossesse, par une campagne d’informer choc à l’instar de celles contre le tabac.
Afin de connaître l’opinion des femmes enceintes sur la consommation d’alcool pendant la grossesse, Stéphanie Toutain, maître de conférences à l’Université Paris Descartes, Cesames (Centre de recherches « Psychotropes, santé mentale, société », Université Paris Descartes - CNRS - Inserm), s’est intéressée aux échanges postés sur des forums internet. L’analyse des réponses de 42 femmes montre que la notion d’abstinence est mal comprise. « L’information est mal diffusée et non homogène », explique Stéphanie Toutain. « Les professionnels de santé éludent souvent la question de l’alcool à moins qu’elle ne soit posée par la femme enceinte. Ils ont des discours divergents et ne semblent pas toujours sensibilisés au sujet ou hésitent à l’aborder pour des raisons diverses : l’appréhension de culpabiliser la femme enceinte, le tabou de l’alcoolisme féminin, la méconnaissance de services susceptibles de prendre en charge une femme enceinte, le manque de temps, etc. ».
Pourtant, il en va de la santé de l’enfant à naître. Le syndrome d’alcoolisation foetale constitue l’atteinte la plus grave de l’exposition prénatale à l’alcool. Cette maladie est notamment responsable de dysmorphies faciales, de retards de croissance et d’un retard mental sévère qui touche 8 000 nouveau-nés sur 800 000 naissances en France. Il faut souligner que le risque d’accoucher d’un enfant atteint dépend de la dose ingérée et que le danger existe dès la première goutte d’alcool.
Dans cette étude, 20% des internautes évoquent les conséquences de la consommation d’alcool pendant la grossesse et 6% seulement en connaissent les conséquences. Les autres femmes ne sont pas conscientes des risques et pensent que la prise d’alcool ne représente pas un danger pour le bébé. Elles se réfèrent le plus souvent à leur mère. En témoigne ce message : « Ma mère a continué à boire deux verres par jour toute sa grossesse, et nous sommes normales » (Erika, 25 ans, assistante de direction). D’après l’enquête, ce type de réponses est celui de femmes possédant un niveau d’études secondaires et dont la mère a consommé de l’alcool pendant sa grossesse.
Ces recherches montrent l’importance d’une sensibilisation accrue de la population aux conséquences de la consommation d’alcool pendant la grossesse. Stéphanie Toutain préconise une campagne d’information choc comme celles contre le tabac ou pour la prévention routière en présentant, par exemple, la différence frappante de taille entre le cerveau d’un enfant sain et celui d’un enfant atteint par le syndrome d’alcoolisation foetale.