Sarkozy a-t-il été l'avocat de Berlusconi ?

Publié le 29 juin 2009 par Jean-Marie Le Ray

La réponse à cette question posée par l'ami Ail & Oignon est OUI !

Sarkozy, ou le cabinet dont Nicolas Sarkozy était associé, a bien défendu les intérêts de Silvio Berlusconi et de Jean-Luc Lagardère contre ... Jacques Chirac, à l'époque de La Cinq, sans parvenir à "dénouer l'affaire".

Rue89 en parlait dans ce billet, en relatant un article du Temps :
Nicolas Sarkozy a été, dans les années 1980, l'avocat de Silvio Berlusconi. (…) Comme le souligne le Corriere della Sera, il défendait les intérêts de l'empire médiatique du Transalpin dans le long contentieux qui opposait La Cinq, achetée par le Cavaliere, au gouvernement français, puis aux partenaires français de la chaîne de télévision. Le groupe d'avocats dont faisait partie Nicolas Sarkozy pour défendre le magnat italien n'était pas parvenu à dénouer l'affaire. Le litige avait nécessité un arbitrage suisse.
En effet, l'affaire était compliquée, comme le montre la chronologie des événements :
20 février 1986 : naissance. Silvio Berlusconi et Jérôme Seydoux, PDG des chargeurs réunis. LA CINQ, première chaîne française privée et gratuite. Le temps des paillettes italiennes; Amanda Lear, Alain Gillot-Pétré, Christian Morin, Roger Zabel.

3 février 1987 : La concession est résiliée par le gouvernement de Jacques Chirac.

23 février 1987 : Robert Hersant et Silvio Berlusconi aux commandes de LA CINQ. "cinq you la cinq". Sébastien, Sabatier, Collaro et Bouvard : un petit tour et puis s'en vont.

14 septembre 1987 : Premier journal télévisé sur LA CINQ. LA CINQ c'est "tous les soirs un film".

23 octobre 1990 : Le CSA accepte la modification du capital. Le groupe Hachette devient opérateur. Yves Sabouret nommé PDG. Robert Hersant : "les meilleurs moments en télévision; c'est quand on obtient une chaîne… Et quand on s'en retire. Jean Luc Lagardère : "Et moi je dis, Hachette va sauver LA CINQ".

(...)

31 décembre 1991 : 10 heures. Dépôt de bilan. LA CINQ version Hachette aura durée 420 jours. Angelo Codignoni (représentant de Silvio Berlusconi) : "A partir de ce moment, nous réflechissons pour voir s'il y a encore des possibilités que LA CINQ ne disparaisse pas des écrans français."

03 janvier 1992 : Maître Hubert Lafont est nommé administrateur judiciaire par le tribunal de commerce. Hubert Lafont :"Il n'est pas possible de dire aujourd'hui quelle sera l'issue de cette affaire." Jean-Claude Bourret crée l'association de défense de LA CINQ; 40 000 adhésions en trois jours.

09 janvier 1992 : 100 000 adhérents à l'association de défense.

15 janvier 1992 : Silvio Berlusconi annonce qu'il peut sauver LA CINQ "dans le respect de la réglementation." Charles Pasqua envisage d'associer les collectivités locales au capital de LA CINQ. Charles Pasqua :" je ne réclame ni la présidence de la chaîne, ni le poste de présentateur."

20 janvier 1992 : TF1, CANAL + et M6 annoncent un projet de chaîne d'information continue pour remplacer LA CINQ.

23 janvier 1992 : 500 000 adhérents à l'association de défense de LA CINQ.

25 janvier 1992 : LA CINQ et son personnel reçoivent le prix "Europe et Liberté 1992" pour récompenser le combat mené par la chaîne pour la pluralité.

03 février 1992 : Silvio Berlusconi dépose officiellement son projet de reprise de LA CINQ. Il envisage une augmentation de capital de 1,5 milliard et le maintient de 600 emplois sur 900. Silvio Berlusconi :"Nous avons quelques idées."

24 février 1992 : 800 000 adhérents à l'association de défense de LA CINQ.

02 avril 1992 : Silvio Berlusconi annonce le retrait de son plan de sauvetage de LA CINQ. Le magnat italien ne peut pas lutter contre les pressions exercées par le gouvernement, par différents hommes politiques et les hautes sphères institutionnelles. Ces derniers ne veulent pas de Berlusconi à la tête d'une chaîne de télévision française. Tout est fait pour l'empêcher de sauver LA CINQ.

12 avril 1992 à 24 h 00 : LA CINQ cesse définitivement de vivre. La cinquième chaîne de télévision française, première chaîne privée et gratuite en France, est morte en direct sous les yeux de plusieurs millions de téléspectateurs.
L'Humanité nous donne davantage de détails :
Si une cession - demandée un temps par Berlusconi - rendrait caduque l’autorisation d’émettre (les fréquences sont incessibles), la continuation signifie une reprise du lourd passif (1,4 milliard de francs). Mais Berlusconi a aussi de bonnes raisons de ne pas laisser « filer » : il détient encore 25% du capital de la chaîne et, surtout, il a vendu ces trois dernières années à La 5, avec ses stocks milanais, pour environ 80 millions de dollars de programmes !

(...)

La solution de Berlusconi n’exclut ni un partenariat avec Charles Pasqua et les « collectivités locales » par le biais d’une société d’économie mixte, ni avec Hachette, réduit à un rôle d’actionnaire minoritaire. Berlusconi doit, en effet, trouver des partenaires. La rumeur cite l’Allemand Leo Kirch, associé à Berlusconi et… à TF1 dans la société de production Tricom, ou la ONCE, association des aveugles espagnols gérant La 5 madrilène avec… Berlusconi. Un entrecroisement d’intérêts privés d’où pourrait bien surgir la nouvelle 5. Pourquoi pas, Hachette se demandent certains ?
En réalité, l'affaire était éminemment politique et Jacques Chirac n'a jamais eu l'intention d'offrir une chaîne au "marchand de soupes" :
Lorsque Jacques Chirac boute Silvio Berlusconi hors de France, lui et sa chaîne télé la Cinq, en 1990, il traite l’entrepreneur italien de "marchand de soupes". Mais il a tort : Il Cavaliere n’est pas seulement un vulgaire politicien corrompu et cupide, c’est aussi et surtout un stratège malin et populaire en Italie malgré les affaires qui le poursuivent. L’incarnation parfaite du Prince de Machiavel. L’homme le plus riche de son pays n’a en effet jamais lésiné sur les moyens pour justifier ses fins. Toute sa carrière est entachée de mystères financiers.
Qui a écrit ça ne croyait pas si bien dire...

Une récente interview de Tarak Ben Ammar en Italie précise :
En France, Chirac ne l’a pas voulu, puisque son gouvernement a exercé des pressions sur son ami Lagardère pour empêcher que Berlusconi ne puisse prendre le contrôle de la Cinq.

In Francia Chirac non l’ha voluto: il governo di Chirac fece pressioni sul suo amico Lagardère, pur di non lasciar prendere il controllo della Cinq a Berlusconi.

Donc, cinq you la cinq, et merci Chirac de nous avoir sauvés de la cata en évitant que Berlusconi ne s'implante en France !

Jean-Marie Le Ray
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P.S. J'observe, en marge de ce billet, que Pasqua a toujours aimé le Ricard, et la soupe...

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