Drogues, reverb’, reformations, OD, tournées, vomi, licenciements, rabibochages… Certains groupes portent des croix comme d’autres des boucles d’oreille. Warlocks, leur histoire est compliquée, parsemée de papillons noirs et de murs étroits. The Mirror explodes, leur dernière fausse couche, n’échappe pas à la règle ; entre un autodafé du bonheur et le matraquage des règles de bienséance.
« Bobby Hecksher a grandi du côté des marais de Tampa Bay, en Floride, passant la majeure partie de son temps dans les locaux de la station de radio que possède son grand-père et dans laquelle sa mère travaille comme secrétaire. A 16 ans (…), il joue occasionnellement avec le Brian Jonestown Massacre tout en participant aux même soirées que le légendaire Timothy Leary. Ces échanges culturels et créatifs amènent rapidement Bobby a former les Warlocks ». C’est ainsi que l’histoire commence, et fait rare dans l’histoire de Wikipedia, le résumé de la vie de Bobby fait plutôt froid dans le dos. On imagine l’adolescence refoulée, les malaises exacerbés, la mère qui tape sur son clavier des notes de comptabilité lorsque son fils participe à des « échanges culturels et créatifs » avec les plus grands gobeurs de pilule des Etats Désunis d’Amérique.
Dix ans plus tard, The Mirror Explodes a simplement creusé le sillon beaucoup trop loin, du moins pour revenir chez les vivants. Décousu, complexe, sombre, le cinquième album sent le marais shoegaze, les ballades romantiques de minuit avec un cadavre dans le coffre, quelque chose de terriblement malsain qui suffirait presque à l’élire « album du mois de juillet chez les disquaires de Detroit ou Dunkerque ».
La pluie en été, le soleil de décembre, l’amour dans les épines, c’est déjà plus que leur antéchrist (The Dandy Warhols) et quand même bien moins que leur prédécesseur (My Bloody Valentine). Le cul entre deux cierges, The Mirror Explodes est donc un disque de fulgurance, balisé de moments de grâce (The midnight sun) et d’errance, le destin de tout chrétien qui se respecte (et se pique backstage). Sur l’intro de You make me wait, on croit reconnaître Chris Isaak en maquillage rouge sang, car la notion d’amour ici même est défigurée, poussée à la moulinette, broyée, piétinée tout en guitares et rack d'effets aériens. Standing Between The Lovers Of Hell, gobée dans la foulée, raidit la nuque ; ces gens là ne font pas semblant. Tant qu’à périr…
Depuis leur sombre réussite (Heavy Deavy Skull Lover, 2007), la bande à Bobby a tout simplement subi d’autres amputations, d’autres cicatrices, d’autres remaniements. Sur The Mirror explodes, on a l’impression que The Warlocks va comme qui dirait pas très bien, plus très bien, que ca va de pire en pire, que tout est derrière et l’avenir un peu monochrome. La bande à Bobby aurait-elle sniffé trop de colle en écoutant White light/White heat? Toujours est-il que The mirror explodes s’écoute comme un long tunnel avec des SOS pour papa qui s’est fait licencié à l’usine. Moins fort que le Primary colors de leur rival (The Horrors), la balle est dans le camp des Warlocks. Ne reste plus qu’à appuyer sur la gâchette. BANG BANG.
The Warlocks // The Mirror Explodes // Tee Pee (Differ-ant)