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Voilà un roman qui serait passé inaperçu si je n'avais étudié les histoires de rationnement pendant les guerres. Ce livre de Jean Dutourd raconte l'opportunisme et l'enrichissement incroyable de la famille Poissonnard.
Regagnant Paris après l'exode de 40, Monsieur et Madame Poissonnard rouvrent leur crémerie, Au bon beurre. Il n'y a pas encore de tickets de rationnement et les affaires reprennent. Julie recommande à son mari de faire du stock. Ils sont au bord de la déroute quand les produits commencent à devenir introuvables. C'est le moment de vendre et de rentrer dans ses frais. Charles fait le tour des campagnes pour se fournir. La crémerie est plus bondée que jamais. Collabo et pétainiste à ses heures, monsieur Poissonard sait repérer quand le vent tourne et se racheter une conduite.
Histoire des fraudes d'un couple de petits crémiers enrichis par la guerre et sur le dos des autres mais aussi d'un intellectuel évadé, d'un communiste, d'un juif, d'un allemand... C'est qu'on croise du monde dans les petits commerces !
Un roman très vivant sur une période honteuse de l'histoire de France. Un portrait haut en couleur de gens pas très brillants mais malins, sans morale. Le tout raconté avec vivacité et justesse : on se moque beaucoup de ces Poissonnard tout en s'effrayant de leur petitesse.