Pourquoi chroniquer ce disque vieux de quatre ans déjà ? Un peu parce que c’était dommage qu’aucune ligne n’ait encore été consacrée à ce groupe canadien sur Dodb, un peu aussi parce que j’ai toujours voulu le faire, mais que j’hésitais avec celui de 2008, A Mount Zoomer. J’ai bien eu le temps de réfléchir, les écouter encore et encore, et même si le deuxième comprend de très bon morceaux ("Call it a ritual", "California Dreamer"), il n’a pas le même impact que celui-ci. En plein dans la brèche entrouverte par leurs voisins d’Arcade Fire et de Broken Social Scene, le quatuor livrait en 2005 un disque très attendu, grâce à deux Ep en état de grâce justement. Un poids sur les épaules qui n’a pas semblé les avoir gênés, même si Apologies To Queen Mary ne révolutionne rien.
Si l’on peut dire une chose sur ce premier album, c’est qu’il est direct. On n’attend pas longtemps avant que commence la première salve de "You are a runner, I am my father’s son", premier hymne binaire qui remplit l’espace sonore, alors qu’en fait ce n’était qu’une intro à "Modern world", morceau typiquement Wolf Paradien, à l’efficacité épique incontestable. Leurs amis Canadiens cités plus haut n’auraient pas fait mieux. Les voix torturées de Dan Boekner (Handsome Furs) et Spencer Krug (Frog Eyes, Swan Lake) s’intercalent à merveille avec les lignes mélodiques ultra répétitives des morceaux, c’est dit, mais ultra efficaces. Apologies To Queen Mary est résolument pop, et annonce sans honte un nombre de hits à faire pâlir n’importe quelle autre formation.
C’est confirmé sur le titre suivant, "Grounds of divorce", qui sans être mon préféré, contient lui aussi d’agréables synthés enragés, et une mélodie pour le moins accrocheuse. Isaac Brock de Modest Mouse est à la production et ça se sent. C’est également lui qui a fait signer le groupe chez Sub Pop, autre gage de qualité. "We built another world" joue lui aussi sur le l’enchevêtrement guitares / claviers, même si je suis moins touché. Trop de bruit finalement. Heureusement, le monumental "Fancy claps" est en suivant. Certes légèrement bourrin, il illustre à merveille la fuite en avant frénétique de certains morceaux. Qui peut rester de marbre face à l’énergie mise en œuvre ?
Très simple dans les compositions, Wolf Parade se contente d’avancer, et de rendre chaque morceau instantané. C’est ce qui peut déplaire, je le comprends. Tout comme les voix qui peuvent par moment rappeler le moins bon de Clap Your Hands Say Yes !. Mais Wolf Parade sait aussi se poser, sur un "Same ghost every night" flottant au gré des breaks. Mais quand je vous disais qu’il y avait des tubes, c’était vrai. Parce que "Shine a light" est juste derrière, et ne fait pas dans la dentelle non plus. Arlen Thompson et Hadji Bakara complètent le quatuor à coup de cymbales et autres chœurs, le groupe parait en place.
Et alors que je voulais vous épargner l’énumération des douze titres, je ne peux m’empêcher de citer encore une fois le titre suivant, "Dear sons and daughters of hungry ghosts" lui aussi parfait avec ses Alala. Heureusement pour vous, les quatre derniers titres, bien que dans l’esprit, ne méritent pas forcément que je m’attarde dessus. M’enfin, huit sur douze cités à comparaitre c’est déjà pas mal.
En bref : simple piqûre de rappel au cas où vous auriez manqué l’arrivée de Wolf Parade sur le territoire indé, cet album pop/ rock à la beauté baroque instantané, remplit jusqu’à la gueule de morceaux tout bonnement jouissifs.
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"Fancy clap" en clip non officiel, le clip de "Shine a light" et "Modern world" pour finir en beauté :