Pete Doherty, star des tabloïds anglais, loin des Libertines et des Babyshambles, sort un premier album solo sous son vrai nom d'enfant sage, Peter Doherty. Dans Grace/Wastelands, Pete libère son âme de poète et de musicien. Reste à savoir si cet enfant abandonné aux drogues parvient à échapper à la noirceur de son âme.
Grace/Wastelands est un titre schizophrénique, une déchirure entre beauté délicate et abandon. On ressent une puissance lyrique dans les textes de Peter Doherty, qui semble verser son cœur dans ces poèmes musicaux. L'accompagnement est un vrai délice, riche et coloré, où Peter Doherty joue principalement de sa guitare acoustique. L'album commence avec Arcady, joyeux folk indé léger et savoureux, plein de jeunesse et d'entrain, qui s'enchaîne avec Last of the English Roses, premier single de Grace/Wastelands. Ce dernier morceau dégage une fraîcheur mystique, caractéristique de l'artiste, et plane sous un soleil vif, alliant saccades d'énergie et poésie. On retrouve cette même énergie sur Palace of Bone, avec des contretemps entraînants et des couplets nous dévoilant une voix plus grave, plus adulte.
Vous aurez également droit à quelques chansons douces et tristes, vous l'aurez deviné, l'album étant au final une œuvre très personnelle. I Am the Rain, à la guitare paisible et mélancoliquement mélodieuse, ressemble à jour de pluie et de solitude, nous berçant parmi vents et nuages. Salome, douce chanson d'amour aux tonalités légères, finit de réchauffer les cœurs littéraires en manque d'évasion. Dans le même esprit doux et sincère, Sheepskin Tearaway, avec la voix magnifique de Dot Allison, prolonge la rêverie avec méticulosité. La dernière piste, Lady Don't Fall Backwards, est le rêve d'un matin d'été aux basses planantes et rondes. Agréablement reposant.
Certaines chansons, comme pour accentuer l'émotion, sont caressées de violons : A Little Death Around the Eyes, co-écrit avec l'ex-Libertines Carl Barât, nous plonge dans un faux romantisme mi-triste, tandis que 1939 Returning réveille les échos du passé pour un beau chant de souvenirs anciens. Après, toujours avec des violons, Broken Love Song, collaboration avec Peter Wolfe, délivre Peter Doherty de son spleen pour un titre énergique entrecoupé d'instants de spleen au piano. New Love Grows on Trees est une suite idéale, un espoir nostalgique de jeunesse et d'amour. Je n'oublierai pas de citer Sweet By and By, anomalie de l'album, dans laquelle Peter Doherty joue le crooner sur fond de piano jazzy et trompettes.
Les plus :
- Des paroles poétiques d'une beauté rare.
- Une musicalité exemplaire.
Les moins :
- Une nonchalance qui peut énerver.
- En achetant cet album, vous financez le marché de l'héroïne.
Verdict : Peter Doherty, que vous détestiez sa personne ou non, est un artiste d'exception. Cet enfant de la littérature nous offre avec Grace/Wastelands une musique très naturelle d'une fraîcheur exceptionnelle. Il est inimitable, et toutes les substances qu'il consomme ne suffisent pas à étancher sa soif de beauté, de rêves et de nouvelles saveurs. Peter Doherty, qu'on le veuille ou non, est une figure essentielle du paysage musical de ce XXIème siècle, et nous prouve une fois de plus qu'il manie la musique comme Cupidon manie son arc : impossible d'y résister.
9/10
1. Arcady
2. Last of the English Roses
3. 1939 Returning
4. A Little Death Around the Eyes
5. Salome
6. I Am the Rain
7. Sweet By and By
8. Palace of Bone
9. Sheepskin Tearaway (ft. Dot Allison)
10. Broken Love Song (ft. Peter Wolfe)
11. New Love Grows on Trees
12. Lady Don't Fall Backwards
Peter Doherty - Grace/Wastelands [EMI]
16 Mars 2009
Last of the English Roses
1939 Returning
I Am the Rain
Sweet By and By
Sheepskin Tearaway