Wavves est le projet solo du californien Nathan Williams, et vous n'avez jamais rien entendu de tel. Classez son style où vous bon vous semble : noise, lo-fi, shitgaze, ou délire sous acide. Wavvves (l'album, avec encore un « v » de plus, comme s'il n'y en avait pas assez), vous adorez ou vous détestez, mais ça ne laisse pas indifférent. À la manière de toute expérimentation délirante, ce projet désoriente. C'est beaucoup de bruit, beaucoup de saturation, et beaucoup de bonheur. Comme vous l'aurez remarqué à la vue des titres, l'univers de Wavves, c'est le surf, le soleil et la plage, sans oublier les démons, les gothiques et - j'allais oublier - l'herbe. Un peu comme des Beach Boys qui auraient signé un pacte avec le diable.
L'intro Rainbow Everywhere, très bruyante et assez inquiétante, annonce la couleur, à la manière d'une crise d'épilepsie : cauchemardesque et sadique. et la plupart des titres sont puissants, avec des rythmes-requins et des déferlantes de guitares rocailleuses. Commençons par Beach Demon, qui nous enthousiasme immédiatement avec son rythme parfaitement cadencé et le son crade de sa guitare. Le titre du morceau, en l'occurence (signifie « démon de plage »), décrit parfaitement le style : c'est une surf music plutôt épanouie passée en lo-fi crépitante, électrique et ardente. La voix, elle, est noyée dans le sable, mélodique et perdue, sans pour autant s'étouffer à la manière d'un shoegaze neurotique. La cadence s'affole sur To the Dregs, qui nous plonge dans une transe sans identité, un mystère du subconscient survolté qui fait disjoncter les synapses. L'énergie déborde de plus belle sur Gun in the Sun, rock de caïd chanté dans des conduits d'aération. Le son est délicieusement saturé sur Wavvves, notamment sur le plus punk California Goths, mi-joyeux mi-sataniste, qui nous propulse d'un élan inimitable. Après les perles So Bored, qui déchire l'air tel une pluie d'acide aux gouttes acérées, et No Hope Kids, rock très efficace en son genre, l'album vous réserve des expérimentations plus particulières.
Sun Opens My Eyes est un réveil sur une plage déserte, coup de soleil inclus, avec des riffs aléatoires dissonants et des percussions hawaïennes. Atypique. Quant à Goth Girls, il s'agit d'une danse macabre aux sons stridents qui sonne un peu Animal Collective (il fallait faire le rapprochement). Wavves, toutefois, reste plus hardcore dans sa pop aquatique. Un peu de calme vous attend sur Weed Demon, ballade électro-acoustique tendre mais agressive, et sur la finale Surf Goths, fantomatique, bad trip idéal pour clôturer ce mauvais rêve. Il faut dire qu'il est difficile de survivre la nausée du duo Beach Goth et Killr Punx, Scary Demons, morceaux aussi chaleureux qu'une mort violente subaquatique à brûlures de méduses. Sans parler de Summer Goth (oui, les titres se ressemblent), une prière destroy à Satan.
Les plus :
- Une énergie explosive.
- Un son sale, pour le bonheur de tous.
Les moins :
- On ne comprend pas les paroles.
- Les patients présentant des symptômes d'épilepsie vont déguster. Migraineux s'abstenir.
Verdict : Cet album est le voyage narcotique d'un surfeur dérangé. On aimerait bien savoir ce qu'il s'injecte, mais le résultat est étonnant, pour ne pas dire détonant. Tant d'adjectifs pour décrire Wavvves. Démoniaque ? Explosif ? Unique : c'est certain. Si vous n'êtes pas du genre à apprécier la musique agressive ou expérimentale, vous n'êtes peut-être pas prêt pour ça. Mais si vous y plongez la tête la première, comme je l'ai fait, vous allez vraiment apprécier le paysage. On est ravi d'avoir découvert Wavves.
8/10
1. Rainbow Everywhere
2. Beach Demon
3. To the Dregs
4. Sun Opens My Eyes
5. Gun in the Sun
6. So Bored
7. Goth Girls
8. No Hope Kids
9. Weed Demon
10. California Goths
11. Summer Goth
12. Beach Goth
13. Killr Punx, Scary Demons
14. Surf Goths
Wavves - Wavvves [Fat Possum]
3 Février 2009
To the Dregs
So Bored
No Hope Kids
California Goths