Reconnaissons que l’ordre du jour de l’actualité médiatico-politique vient d’être largement imposé par le Chef de l’Etat. : un congrès des parlementaires à Versailles, grande première, et l’annonce sur le perron de l’Elysée de la composition du nouveau gouvernement. Il était impossible au journaliste le plus récalcitrant ou sourd de passer outre.
Il est évident que le Président de la République maîtrise parfaitement les données médiatiques modernes. Il sait à merveille composer l’agenda des rédactions.
Certains lui en font le reproche. Il rendrait ainsi inaudible toute autre information en provenance de l’opposition.
Un tel télescopage serait crédible si l’opposition suivait le rythme en annonçant des changements radicaux de stratégie, d’alliance ou de programmes. Mais il ne manquerait alors pas d’éditorialistes pour les suivre et nous en faire part, tant l’indigestion Elyséenne menace. Mais rien de bien neuf à se mettre sous la plume sur ce côté de l’échiquier, mis à part les incantations habituelles et les jeux de scène. C’est tristounet d’entendre Martine Aubry déclarer, sortant du congrès : “le Président est dépassé par les évènements” De telles envolées ne peuvent qu’accentuer la perception populaire d’un décalage de plus en plus grand entre ceux qui s’opposent et ceux qui sont maîtres du jeu.
Les “dépassés” sont, en fait, ceux qui ambitionnent ou font semblant de souhaiter l’alternance : incapables de proposer un leader, des idées nouvelles, des solutions originales. Ils n’arrivent pas à “reprendre la main“; ils ne sont pas dans le tempo ! Leur laboratoire aux idées est en panne.
Un exemple hilarant vient d’être fourni par la mascarade de l’opposition à Versailles. Nous avons été témoin d’une protestation muette.Quel courage ! L’impact en est énorme, jugez-en : il s’agissait de savoir si les parlementaires se lèveraient ou resteraient assis à l’entré du Président. Jean-Michel Baylet, a glissé un mot à l’oreille de François Bayrou avant de se lever puis de se rasseoir. François Bayrou, après un moment d’hésitation, a regardé autour de lui avant de décider de rester sur son siège. Pour la gauche, la chose était plus préparée : tous les parlementaires de gauche présents sont restés ostensiblement assis. L’UMP était bien entendu debout.
Ce n’est pas de la résistance efficace ça ? Un acte politique majeur ? Certains ont pu affirmer que se lever est une marque de simple politesse à l’égard d’un Chef de d’Etat; ils n’y sont pas du tout, restés assis était d’une très grande symbolique, un acte “fondateur” ! N’en doutons pas, c’est avec de tels symboles que l’on gagne les élections.
Après le discours du Président la parole appartenait aux parlementaires, belle occasion devant les caméras de démonter point par point les affirmations du chef de l’Etat : Refus absolu de participer à un tel débat pourtant réclamé naguère. En revanche la course aux studios télés et radios s’engageait à celle ou celui qui irait le plus vite crier au scandale et à l’ignominie. On peut tout dire du discours du Président devant le congrès : rien de nouveau, des banalités, des grands mots sans effet etc. à ceci prêt que personne n’a été capable de lui répondre et de présenter pendant plus de 50 minutes un discours structuré. Le peuple retiendra : rien en face ! Sans doute ce peuple n’est-il pas parfaitement heureux de la situation, qui le serait ? Mais il sent bien aussi que rien ne lui est réellement proposé d’autre et qu’il n’y a pas un porteur crédible alternatif.
Passons à la seconde saga de la semaine, les observateurs attendaient un remaniement “light“, simple ré-aménagement technique après les élections européennes.
Perdu !
C’est un mouvement plus large qui a été annoncé sur le perron de l’Élysée. Nous mettrons de côté la disgrâce peu élégante de Rama Yade, libérée des droits de l’homme pour tomber dans le saut de haies, elle a accepté, l’imprévisible à la mode Rachida est terminé !
On ne pourra en revanche qu’apprécier l’habileté de la nomination de Frédéric Mitterrand à la culture : une “ouverture” qui n’en est pas une, mais qui a le goût d’une ouverture et qui laissera sans voix une opposition sidérée et sans doute gênée d’attaquer le neveu du Chef charismatique. Le poste n’est certes pas stratégique en période de crise économique mais au combien symbolique et cette nomination vaut tous les “Allègre” du monde ou autres débauchages au PS. La captation patronymique fera son effet, mais la qualité du personnage et sa reconnaissance par les milieux bobo, du cinéma, du show-biz et de la littérature, par le cénacle parisien des culturels, ne peuvent qu’être porteurs d’un capital d’avenir : un choix intelligent et rentable à condition qu’il ne se termine pas par un divorce … La personnalité du neveu de Tonton n’est pas transparente et il ne faudrait pas que le scénario se termine à la Jean-Jacques Servan-Schreiber du temps de Giscard.Ainsi vont les semaines, rythmées par le faubourg St Honoré hier Versailles, aujourd’hui le perron, demain les Antilles … Il faut donc que l’opposition s’y fasse, Sarkozy est très fort pour manier le calendrier et le succès qu’elle fait semblant d’escompter ne lui tombera pas tout cuit dans l’escarcelle. 2012 c’est demain et pour l’heure rien n’est en place; les opposants auront beau invoquer la presse achetée, les médias à la botte, que sais-je, la réalité c’est qu’ils sont impotents, frappés de nombrilisme et en manque d’idées nouvelles. Une alternance ça se mérite. Mais … au fait … en ont-ils vraiment envie ces Barons de Régions ? Le calendrier ne serait-il pas tout différent pour eux : les régionales de 2010 et pas 2012 ?