Qu’est devenue « la blonde valseuse » ? Cela rappelle un conte de Maupassant dans la même veine cynique : « Adieu »
« Chez un autre, la barbe blanche substituée à la barbe blonde, comme le visage était resté vif, souriant et jeune, le faisait paraître seulement plus rouge et plus militant, augmentait l'éclat des yeux, et donnait au mondain resté jeune l'air inspiré d'un prophète.
La transformation que les cheveux blancs et d'autres éléments encore avaient opérée surtout chez les femmes m'eût retenu avec moins de force si elle n'avait été qu'un changement de couleur, ce qui peut charmer les yeux, mais, ce qui est troublant pour l'esprit, un changement de personnes (...)
Car ces changements, je savais ce qu'ils voulaient dire, ce à quoi ils préludaient. Aussi cette blancheur des cheveux impressionnait chez les femmes, jointe à tant d'autres changements. On me disait un nom et je restais stupéfait de penser qu'il s'appliquait à la fois à la blonde valseuse que j'avais connue autrefois et à la lourde dame à cheveux blancs qui passait pesamment près de moi.
Avec une certaine roseur de teint ce nom était peut-être la seule chose
qu'il y avait de commun entre ces deux femmes, plus différentes - celle de ma mémoire et celle de la matinée Guermantes - qu'une ingénue et une douairière de pièce de théâtre. Pour que la vie ait
pu arriver à donner à la valseuse ce corps énorme, pour qu'elle eût pu alentir comme au métronome ses mouvements embarrassés, pour qu'avec peut-être
comme seule parcelle commune, les joues, plus larges certes, mais qui dès la jeunesse étaient couperosées, elle eût pu substituer à la légère blonde ce vieux maréchal ventripotent, il lui avait
fallu accomplir plus de dévastations et de reconstructions que pour mettre un dème à la place d'une flèche, et quand on pensait qu'un pareil travail s'était opéré non sur de la matière inerte
mais sur une chair qui ne change qu'insensiblement, le contraste bouleversant entre l'apparition présente et l'être que je me rappelais reculait celui-ci dans un passé plus que lointain, presque invraisemblable (...) »