Depuis le 7 mai et le lancement de l’offensive généralisée des moudjahiddin liés à Al Qaeda – Shebaab et Hizbul
Islam – le gouvernement de transition (TFG) de « l’islamiste modéré » Sheikh Sharif Ahmed n’a
cessé d’essuyer des revers, reculant sur tous les fronts, incapable de contenir les assauts répétés des fous de Dieu. Aujourd’hui, la fin semble proche, et le gouvernement, qui ne contrôle que
quelques rues d’une capitale en ruine, et des enclaves au centre du pays, lutte pour sa survie. Les milices islamistes mènent,
depuis le 16 juin, une série d’attaques et d’attentats terroristes qui a décapité l’élite politico-militaire du pays, comme si elles voulaient signifier que le coup de grâce n’allait pas tarder à
être porté. En trois jours, quatre haut dignitaires du régime ont été assassinés.
Le 16 juin, le colonel Ali Said Hassan, commandant de la police de la région de Mogadiscio, a
été tué dans le district de Hodan lors d’un assaut raté des forces gouvernementales contre des positions islamistes. Sept autres personnes ont également succombé dans les échanges de tirs. Le
lendemain, 17 juin, à Beledweyne, capitale de la province de Hiran dans le centre du pays, le ministre de la sécurité intérieure, Omar Hashi Aden, ainsi que l’ancien ambassadeur de Somalie en
Ethiopie, Abdikarim Lakanyo, ont été pulvérisés par un attentat-suicide à la voiture piégé revendiqué par un groupe terroriste affilié à Al Qaeda et proche de Sheikh Ali Dheere Mohammed, dit
« Abu Ayman », émir régional des Shebaab. Cette attaque, qui est intervenue au terme d’une journée d’affrontements particulièrement sanglants à Mogadiscio, a également fait 20 autres
victimes.
Enfin, le 19 juin, le député Mohamed Hussein Addow, chef de guerre rallié au pouvoir intérimaire, a été exécuté après avoir été enlevé par un groupe d’insurgés qui a pris le contrôle d’une
nouvelle zone de Mogadiscio. Il s’agit du quatrième assassinat en trois jours d’un haut responsable somalien du pouvoir de transition, que les islamistes ont juré de renverser. Cet assassinat
était peut-être le plus symbolique, dans la mesure où il visait un seigneur de guerre qui avait accepté de rejoindre le large arc de coalition formé autour de l’ancien chef des Tribunaux
islamiques. Or le refus des moudjahiddin de participer à un gouvernement dont ils ne seraient pas les pivots est à l’origine du djihad total à l’œuvre aujourd’hui.
Les soubresauts de l’islamisme somalien s’apparentent ainsi, depuis 2006, à des poupées russes d’où sortent à chaque nouvelle crise des djihadistes plus radicaux encore que les précédents. Quand
les Tribunaux islamiques ont été chassés par la désastreuse intervention éthiopienne appuyée par les néoconservateurs, au nom de la War on Terror, les Shebaab ont émergé d’une
dissidence des Tribunaux islamiques, jusqu’à prendre le contrôle de la majeure partie du pays. Et
quand le TFG, successeur des Tribunaux, hostile à l’islamisme, porté à bout de bras par la communauté internationale, s’est effondré à son tour en décembre 2008 sous la pression des Shebaab,
c’est l’ancien chef des Tribunaux Islamiques Sheikh Sharif Ahmed qui, à la tête de l’ARS (Alliance pour une Re-Libération de la Somalie), a pris les rênes du gouvernement. Et c’est alors que le
Hizbul Islam a fait son apparition sur le marché de l’islamisme djihadiste, d’une scission avec l’ARS ! Pour résumer, la maison mère des Tribunaux islamiques naguère chassée du pouvoir se
retrouve aujourd’hui soutenue par la communauté internationale face à deux groupes de moudjahiddin qui s’en sont successivement détachés, respectivement en 2006 et début 2009. L’émergence du
Hizbul Islam en janvier est donc directement corrélée au refus de Sheikh Hassan Dahir Aweys de participer au pouvoir de son ancien allié. Sa création repose sur une agrégation de quatre petits
partis islamistes distincts, qui sont nés de la guerre sainte contre l’occupant éthiopien en 2007 : le Jabhatul Islamiya (Front Islamique), Mu’askar Ras Kamboni (les Brigades de Ras
Kamboni), Muaskar Anole et l’Alliance pour la Re-Liberation de la Somalie-Erythrée (scission de l’ARS) de Sheikh Hassan Dahir Aweys, qui en a pris le leadership après une courte lutte
interne.
Pour la première fois depuis janvier, le Président somalien a appelé la communauté internationale et ses voisins « à l’aide », signe de l’imminence de l’effondrement du TFG. Un
effondrement de plus. La dernière fois qu’un Président somalien a appelé la communauté internationale à l’aide, c’était en novembre 2008 : un mois plus tard, il démissionnait, admettant que
les djihadistes contrôlaient désormais de facto le pays…