Lundi, 22 juin 2009
Les employés d’Air Canada doivent vraiment en avoir ras-le-bol. Ils doivent encore une fois faire les frais d’un réaménagement de leurs conditions de travail, et ce, à peine six ans après avoir consenti des coupures importantes pour permettre à la compagnie de reprendre son envol.
Ce qui est navrant pour eux, c’est que ce sont les mêmes gens, Robert Milton, président du Conseil, et Calin Rovinescu, président et chef de la direction, qui ont piloté la faillite et la restructuration de janvier 2002 à septembre 2004, qui tirent encore les ficelles.
C’est peut-être la raison pour laquelle le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), qui représente les 6700 agents de bord à l’emploi du transporteur canadien, refuse pour l’instant d’accepter les dernières offres de compressions de l’employeur.
Air Canada a un urgent besoin de trouver un nouveau financement de 600 millions de dollars pour poursuivre ses opérations à cause des exigences bien justifiées des compagnies de cartes de crédit.
Advenant une nouvelle faillite du transporteur, les compagnies de cartes de crédit ont peur d’être prises en souricière entre Air Canada et ses clients qui achètent des billets à l’avance par carte de crédit. C’est pourquoi elles exigent qu’Air Canada maintienne une position d’encaisse d’au moins 800 millions. Comme Air Canada brûle l’argent rapidement, il lui faut emprunter à nouveau pour conserver ce niveau d’encaisse.
Il semble que le gouvernement (environ 200 millions) et quelques institutions financières (pour le reste) seraient disposés à prêter les 600 millions, mais à la condition que les syndicats acceptent des concessions qui permettraient à l’entreprise de réduire ses coûts. Quatre des cinq syndicats d’Air Canada ont accepté de faire des concessions, mais le SCFP résiste.
Pour l’amener à plier, la ministre du Travail, Rona Ambrose, a nommé deux médiateurs: James Farley, ex-juge de la Cour supérieur de l’Ontario qui avait présidé à la restructuration d’Air Canada en 2003-2004 et qui est aujourd’hui à l’emploi du cabinet McCarthy Tétrault, et Jacques Lessard directeur régional,section Québec, du Service fédéral de médiation et de conciliation du Programme du travail.
Le SCFP doit se demander sérieusement si ce nouveau prêt ne servira qu’à acheter un peu plus de temps, et si une nouvelle faillite d’Air Canada est dans les faits inévitable.
Il est clair aujourd’hui que la restructuration d’Air Canada en 2004 est un échec. Les dirigeants de l’entreprise ont passé les cinq dernières années à trouver des excuses à chacune des assemblées d’actionnaires pour expliquer les déboires de l’entreprise, tout en répétant chaque fois que l’avenir était prometteur.
Doit-on encore laisser ces mêmes individus, qui n’ont pas su relancer Air Canada malgré tous les moyens à leur disposition, dépenser encore temps et argent, dont celui de ses employés, à tenter de remettre la compagnie sur pied ? Le SCFP aura un gros mot à dire. L’exaspération est-t-elle maintenant assez grande pour qu’il refuse d’engloutir encore de l’argent dans cette restructuration qui semble sans espoir de réussite ?
La crise économique a amené le gouvernement américain à réformer les institutions financières, ainsi que certaines entreprises jugées vitales au bon fonctionnement de l’économie, tel General Motors. Le gouvernement canadien devrait peut-être se pencher sérieusement sur le cas d’Air Canada.
Ce qui assurera un avenir à Air Canada, ce n’est pas un nouveau prêt, mais un nouveau plan d’affaires. Et ce ne sont pas ces dirigeants qui perpétuent l’échec depuis 15 ans qui pourront le concevoir et le mettre en place.